mardi 24 novembre 2009

Hommage à Quinze Capotes

Si mon prénom fut le plus fréquemment donné aux petits Français l’année de ma naissance, mes parents – enfin, surtout mon père – se sont dédouanés en me transmettant un patronyme peu commun (un « drôle de nom » s’est dit Maman quand Papa s’est présenté, d’ailleurs un demi-siècle plus tard Fabrice Gabriel était d’accord ; il a, sans consulter ma mère, écrit les mêmes mots – « drôle de nom » – quelque part dans un numéro déjà ancien (août 2001) des Inrockuptibles). C’est une chance assurément, ça facilite grandement les requêtes que, surtout en période de publication, je gougueulise à intervalles rapprochés. En effet, nous autres Annocque ne sommes guère plus d’une soixantaine d’individus dans l’Hexagone, si j’ai bien compté (je compte rarement) – auxquels il faut sans doute rajouter quelques Belges et Néerlandais –, rares donc précieux, et fiers de l’être. Que d’ailleurs ce billet soit l’occasion de saluer tous mes cousins à la mode d’Artois, car à n’en pas douter nous constituons une grande famille, même si je n’en ai aucun indice autre que notre origine commune : le Pas-de-Calais.
C’est justement à un autre Annocque, inconnu de moi jusqu’à tout récemment, que ce billet tient à rendre hommage : Louis Annocque, dit « Quinze-Capotes » – voilà bien, vous en conviendrez, un sobriquet qui inspire le respect. Un jour que je gougueulisais, je fus mené par la main jusqu’aux Archives Nationales, et tombai non sans émotion sur une liste des dossiers de recours en grâce de condamnés à mort entre 1900 et 1916 ! Y aurait-il un assassin parmi nous ? La vérité, non moins tragique, était autre, que je vous donne à lire :
 
MILLON
Jules-Charles-Alphonse
Né/née : 27 décembre 1887
Profession : journalier à Boulogne-sur-Mer
Date de la condamnation : 12/01/1909
Motif de la condamnation : assassinat suivi de vols qualifiés et vols simples connexes commis dans la nuit du 13 octobre 1908 sur et au préjudice du sieur ANNOCQUE, dit Quinze Capotes, âgé d’une cinquantaine d’années.
Juridiction : Douai
Date de grâce : 05/04/1909
Remarques : peine commuée en celle des travaux forcés à perpétuité.
 
Pas de chance, Quinze Capotes. Millon, au bagne ! L’a-t-on envoyé en Guyane ? Si ça se trouve, c’était ce Millon, ce bagnard que ma grand-mère maternelle a trouvé caché sous son lit. Le monde est si petit. Ouste ! Du balai !
Revenant à Louis Quinze-Capotes, mon probable arrière-grand-cousin du côté paternel, j’ai invoqué de nouveau aujourd’hui l’oracle Google, qui a bien voulu m’en dire plus, par la voix – ou plutôt la Voix – du Nord (car le Nord, Monsieur le Président, avait une voix même avant Dany Boon) – qui voudra bien, j’espère, me laisser recopier ici son hommage à Quinze-Capotes :
 

  Il y a 101 ans, « Quinze capotes », un Audomarois excentrique était assassiné
Au début du siècle dernier, Louis Annocque, plus connu sous le sobriquet de « Quinze capotes », défrayait la chronique audomaroise par ses excentricités. Il devait son surnom au fait qu’il revêtait plusieurs habits les uns par-dessus les autres.
Ce personnage original habitait rue des Bleuets où il vivait en compagnie de son fidèle cheval. Il se déplaçait toujours avec celui-ci attelé à un char romain dans les rues de Saint-Omer. Régulièrement, une vente aux enchères de ses biens avait lieu sur la grand-place au profit du fisc afin de payer ses impôts dont il ne s’acquittait jamais. Lors de la vente publique, il rachetait toujours ses biens mis en vente avec la complicité d’un ami. Il voulait qu’après sa mort, on l’étrangle pour être sûr de ne pas être enterré vivant !
Le 13 octobre 1908, il fut bien étranglé, mais de son vivant, par Jules Millon, pupille de l’assistance. Après son arrestation, il nia son crime avant d’avouer en décembre 1908. Jules Million, 21 ans, fut jugé le 11 janvier 1909 par la cour d’assise de Saint-Omer et condamné à mort. Trois mois plus tard, sa peine sera transformée en travaux forcés à perpétuité.
Après la mort de « Quinze capotes », on retrouva chez lui près de quarante testaments dont un qui faisait de l’État le légataire universel. Sa famille intenta un procès à l’État afin de récupérer les 200 000 francs de l’héritage, mais en vain. Au vu de cette photographie de Louis Annocque prise au début du siècle dernier, on comprend mieux l’expression bien connue des Audomarois « être couvert comme Quinze capotes ».



Commentaires

Respect ! Ça c'est de l'ancêtre.
Commentaire n°1 posté par Didier da le 24/11/2009 à 19h37
De l'arrière-cousin tout au plus, mais tout de même, on se sent quelqu'un !
Réponse de PhA le 24/11/2009 à 20h34
Au moins se souvient-on des excentriques ! Ce Quinze Capotes aurait plus à Alphonse Allais, à Alfred Jarry et j'en passe ! Et puis il aimait son cheval, peut-être une jument aux dents vertes.
Commentaire n°2 posté par dominique boudou le 24/11/2009 à 20h21
Surtout quand ils ont l'élégance de disparaître tragiquement ! (Je me vois bien aller au collège en char romain...)
Réponse de PhA le 24/11/2009 à 20h33
Appartenir à la lignée des quinez capotes, voilà qui a plus de classe que d'appartenir à celle des bas bleus...
Commentaire n°3 posté par petite racine le 24/11/2009 à 21h47
Dès demain, je sors couvert !
Réponse de PhA le 24/11/2009 à 22h40
Belle histoire !
Ne serait-ce pas une légende que tu nous inventes? Tu ne te couvres jamais, tu n'as pas de cheval ni de char romain, des dettes j'en sais rien, à moins que tu ne tiennes de lui que par l'imagination et l'étrange (à chacun son excentricité) et là, oui, je te reconnaîtrais.
Belle histoire, oui, on l'envie !
Commentaire n°4 posté par Pascale le 24/11/2009 à 22h29
Une légende ? Mais je n'ai aucune imagination !
Réponse de PhA le 24/11/2009 à 22h43
Allons bon !
Commentaire n°5 posté par Pascale le 24/11/2009 à 22h45
Bon, je reconnais avoir inventé quelques histoires (qui se résument vraiment à pas grand-chose) pour qu'on puisse dire que mes livres sont des romans ; en revanche tout ce que j'écris dans ce blog est rigoureusement authentique ; juré !
Réponse de PhA le 24/11/2009 à 22h53
Soit! Alors plus de quête identitaire, ton passé est tracé!
Commentaire n°6 posté par Pascale le 24/11/2009 à 23h23
Je n'ai aucune envie, quant à moi, de savoir si oui ou non... Cette histoire est trop belle et je la déclare historiquement, rigoureusement, authentique. Certificat à l'appui.
Commentaire n°7 posté par Depluloin le 25/11/2009 à 18h00
La Voix de ch'Nord ne raconte que des histoires vraies.
Réponse de PhA le 25/11/2009 à 19h33
Chouette, il me fallait une histoire avant d'aller au lit.
Une autre demain soir j'espère ?
Commentaire n°8 posté par Anna de Sandre le 25/11/2009 à 22h39
J'espère que vous avez fait de beaux rêves !
Réponse de PhA le 26/11/2009 à 14h51
Depluloin, vous n'êtes pas drôle, c'est Philippe que je voulais titiller (car évidemment je me moque de savoir quoi que ce soit, cette histoire est belle, j'ai même dit que je l'enviais). Enfin...
Commentaire n°9 posté par Pascale le 26/11/2009 à 00h06
Mais si, Depluloin est drôle ; m'enfin !
Réponse de PhA le 26/11/2009 à 14h54
Finalement, ces capotes, ce sont comme celles des 2 cv Citroën que j'ai eues, on les roule ou on les déroule, le toit ouvrant sur le ciel, mais pas électrique ni mécanique - manuel, à rouler comme une cigarette (on était pauvres comme Job).
Ou alors, ce sont ces vêtments superposés en mille-feuilles : des pages mises l'une sur l'autre, chaque jour, empilées, puis un jour elles ont laissé passer, sans doute par accident, un spermatozoïde littéraire qui s'en allé féconder l'ovule de l'édition...
Commentaire n°10 posté par Dominique Hasselmann le 26/11/2009 à 13h24
Qui sait...
Réponse de PhA le 26/11/2009 à 14h53
@ Pascale : Mais oui je suis drôle! puisque Philippe vous le dit!! enfin!!
Commentaire n°11 posté par Depluloin le 26/11/2009 à 17h46
Pff...
Commentaire n°12 posté par Pascale le 26/11/2009 à 18h05
Mais dites donc, vous ne m'aviez pas dit que vous aviez un ancêtre commun avec Depluloin! Passionnant !
Ce goût pour Titan, maintenant tout s'explique , il faut prévenir Nonnon !
Commentaire n°13 posté par Souricette le 27/11/2009 à 21h22
Comment ? Combien de Capotes, Depluloin ?
Réponse de PhA le 27/11/2009 à 23h05
C'est mieux de répondre très tard que pas du tout.
Je m'excuse pour mes fautes d'ortographe mais je belge du côté flamand, eh oui....... .
Dans toute la Belgique il y a plus d' Annocqué, une des dernières était ma grand-mère décédée en 1978, le dernier Annocqué belge est décédé en 1995. Le nom d' Annocqué n'exsiste plus en Belgique depuis 2001 ( décés de Madame Annocqué Germaine mais elle était de naissance Française pour être exacte de Montrouge ).
Les Annocqué ( aussi Annokkee ) de Hollande sont d'origine belge.
Commentaire n°14 posté par De Witte Willy le 08/01/2010 à 15h29
J'avais remarqué cette orthographe si voisine qu'elle en est troublante - mon nom n'a pas l'accent aigu. En fait je sais peu de choses sur mes origines patronymiques, mon grand-père paternel étant décédé dès 1928. Merci de votre visite !
Réponse de PhA le 08/01/2010 à 18h24

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