dimanche 28 février 2010

NEW YORK TROIS MACHINES D’AMOUR À MORT


Fable sur le sommeil.
Comme elle s’était endormie totalement ivre la veille, la prisonnière des plus beaux rêves du circuit Blanc se réveilla un beau matin à la porte du cauchemar : en cheveux, démaquillée, les larmes aux yeux, un filet d’étain fondu marbrant son vi­sage, elle tendit les mains vers ses clopes mais n’eut pas le temps de les saisir; elle aperçut l’ennui sans rien en ressentir.
Une deuxième fois ses yeux s’ouvrirent (elle sentit le cuir d’un canapé de terrasse sous ses doigts) sur l’ennui : elle se fit du café sans le voir. Elle entreprit de traverser le couloir d'une centaine de mètres de long qui l’amènerait jusqu’à la salle de bains. Elle se perdit au début, au milieu, à la fin. Elle repartit vers la cuisine, un tube de somnifères dans chaque joue.
La troisième fois les couvertures écossaises à carreaux roses couvraient une bouche au goût de citron et de sel et des yeux sans images, incapables de repérer dans l’environnement un pourtant omniprésent sentiment de vide. Regard vague qui n’eut pas plus de conséquences.
Trop fatiguée pour se tuer, elle but du jus d’orange pour se donner la mort. Un quart d’heure plus tard, elle regardait encore atone une rangée de couteaux inoxydables.
Alors elle se rendormit et la peau douce des longues phalanges, claire, rose, et jaune de clopes chaudes entre le majeur et l’index, réapparut sur toute la surface. Réparé de lui-même, le circuit Blanc reprenait conscience et refaisait sa jonction, mettant un terme à l’expression maladroite de ces rêves ordinaires.
La fable indique que l’ennui est indépassable. La morale trouve ça plutôt triste, mais bon, on va pas non plus en faire un fromage.
 
Ludovic Bablon, NEW YORK TROIS MACHINES D’AMOUR À MORT, « Fabuleuse Helen Smith, 5 » Les Petits matins, 2010, p. 103-104.
 
Le Renard y a été trop fort, il a beau appuyer sur Move Up, le tas de pixels morts nommé Sarah Cohen ne veut pas se redresser. Bon, il va quand même pas jouer tout seul ?
Alors est-ce qu’elle s’en sortira mieux s’il lui re­donne une chance ? Allez, il lui propose un rôle dans une version améliorée de New York.
Cette version, intitulée Renardville – We Win, You Lose, est un jeu de colonisation dont voici le scénario.
La mythique ville de New York a disparu sous les hordes barbares et les tornades de boules de feu. Il ne reste rien qu’un immense terrain vierge. Le but est de construire Renardville en un minimum de temps et avant l’adversaire.
Dans ce jeu, Sarah Cohen incarne la tentation de créer une gigantesque mégalopole, censée prospé­rer à partir de rien. Un Renard aux talents de pro­moteur immobilier lui donne pas mal de fil à retordre. Son propre module d’intelligence Artificielle donne à Sarah Cohen le droit d’installer sous le nom de cité « New York » quelques tentes primitives dans les zones des marais périphériques.
 
Ludovic Bablon, NEW YORK TROIS MACHINES D’AMOUR À MORT, « Sarah Cohen, icône du jeu vidéo, 5 » Les Petits matins, 2010, p. 110-111.
 
C’est le stade des Prairies Rougissantes au stade où elle a vraiment l’impression de jouer contre un mur noir. Et en effet on peut dire que le coup du Bloc Noir lui pose quelques problèmes tactiques.
Elle perçoit parfaitement les trajectoires qui entrent et sortent de sa moitié de terrain, mais tout se passe comme si un bloc d’impensé noir avait atterri sur l’autre moitié du court, consti­tuant une zone franchement pas claire, on pour­rait même dire opaque, du circuit électrique, dont le masquage diminue d’autant la lisibilité des trajectoires et donc la réactivité de la joueuse.
Côté circuit Noir par contre, ça ne se passe trop mal. En fait, pendant les quand même neuf heures que dure le Bloc Noir, eh bien à tout moment il se sent bien dans son tennis et déambule en long, en large, pensif. Il semble attendre, patiemment appuyé contre le battement immobile de son bloc-­raquette, que s’ouvre une voie, un havre, une op­portunité. Ses coups droits en miroir sont appliqués, puissants, et réguliers, mais ses pensées ­sont ailleurs, et au lieu de perdre son temps à se de­mander Tiens, voyons voir, quel effet ferait une ­balle projetée à 300 km/h dans un morceau se ma­tériau synthétique reproduisant la texture du crâne, humain ?, il préfère par un examen que les plus chauds qualifieraient d’« a freddo » consulter deux ­électromyographies d’un coup de tennis complet de Mademoiselle Bauer.
 
Ludovic Bablon, NEW YORK TROIS MACHINES D’AMOUR À MORT, « Frida Bauer, B comme Bauer, V comme…, 5 » Les Petits matins, 2010, p. 118-119.



Commentaires

Non, non, et non! Je ne vous écoute pas, je me bouche les oreilles! Je n'achèterai plus de livres avant... pas longtemps j'imagine!
Commentaire n°1 posté par Depluloin le 28/02/2010 à 19h42
Il ne faut pas dire "Fontaine je ne boirai pas de ton eau" car qui a bu boira, qui vole un oeuf vole un boeuf et qui m'aime me suive.
Réponse de PhA le 28/02/2010 à 20h07
Pour ne pas vous laisser emmerder Loïs, je n'ai rien lu. Par contre les condos (condensateurs de liaison) sur la photo, c'est des Philips ou des MKP ?
Commentaire n°2 posté par Anna de Sandre le 01/03/2010 à 10h26
Mais enfin, vous ne voyez pas que c'est une maquette de New York, la ville où les jeunes femmes se meurent d'amour pour des circuits électroniques ? N'avez-vous pas remarqué comme on y voit la vie en rose ? Lisez donc ce mode d'emploi signé Bablon, vous comprendrez tout.
Réponse de PhA le 01/03/2010 à 12h29
Hors de question !
Commentaire n°3 posté par Anna de Sandre le 01/03/2010 à 13h23
Lisez, je le veux.
Réponse de PhA le 01/03/2010 à 16h01
Oooooh, je vois une grande lumière céleste !
Commentaire n°4 posté par Anna de Sandre le 01/03/2010 à 18h20

mercredi 24 février 2010

T’en fais pas mon pote, j’écrirai tout.

Les repas sans lui, c’était la première fois, il mangeait dans sa chambre, je sais pas quoi, je me demande ce qu’il pouvait encore avaler ou digérer, s’il suivait un régime spécial, sûrement, à cette époque, vers la fin, tout son corps était touché, c’était la fin, une fin.
En partant ce dimanche soir, on leur a dit qu’on revien­drait le dimanche suivant, on pouvait pas avant, oui, même si on savait déjà, avant cette visite, June nous l’avait dit, qu’il pouvait partir à tout moment, pour la première fois, elle en avait accepté l’idée, même si jusqu’au bout, elle a espéré un miracle.                                    Je savais que s’il était toujours en vie la semaine suivante, il ne serait presque plus en état de parler, vu la vitesse à laquelle son état se dégradait, il se désintégrait, et mes dernières paroles pour lui, le peu que je pouvais lui donner, seul avec lui, prêt à partir, déjà habillé, la voiture n’attendant plus que moi pour nous emmener à la gare, c’était main­tenant, alors je l’ai regardé, j’ai soutenu son regard, qui cette fois ne me lâchait pas, au prix de quel effort, je me le demande, et je lui ai dit, je n’ai rien trouvé d’autre, qu’est-­ce que j’aurais pu dire d’autre, je lui ai dit, T’en fais pas mon pote, j’écrirai tout.             T’auras pas grand-chose à raconter, c’est ce qu’il m’a dit, après un silence, très len­tement, et toujours, ce regard.                       On en est tous là, c’est ce que je lui ai dit.
 
B.S. Johnson, les Malchanceux, Quidam, 2009.
 
Impossible de préciser la page. Ça peut être vers la fin, ça peut être vers le début ; ça changera sans doute la lecture, le ton ; ça ne changera rien au fait que ce livre est un bien plus qu’un bel objet inventif et insolite.
On lira avec profit les avis notamment de Bartleby et de Claro.


Commentaires

Je ne sais pas pourquoi je ne l'ai pas acheté lorsque j'en avais l'occasion. Par pudeur, je crois - oui, c'est idiot! Mais à la lecture de ce passage, j'ai peut-être bien fait d'attendre d'être en meilleur forme! Mais que c'est beau. (Vous avez respecté les espaces, c'est ça?)
Commentaire n°1 posté par Depluloin le 24/02/2010 à 13h16
Il n'est pas trop tard ! C'est un livre profondément humain - y compris dans sa forme.
(Oui, j'ai essayé de respecter les espaces.)
Réponse de PhA le 24/02/2010 à 13h55
Oui ce B.S. Johnson a l'air vraiment formidable.
Au fait, êtes-vous allé à cette soirée ou un auteur devait parler de lui?
Commentaire n°2 posté par Ambre le 24/02/2010 à 13h57
Oui - et oui : c'est un auteur formidable !
Réponse de PhA le 24/02/2010 à 14h07
Ah mais... vous y étiez avec DdS? Hi!
Commentaire n°3 posté par Ambre le 24/02/2010 à 15h03
Comme vous voyez...
Réponse de PhA le 25/02/2010 à 17h16
Tiens, c'est étrange, j'ai entendu tout récemment parler de ce B.S. Johnson, je ne sais plus trop où. Je ne me souviens surtout d'une question complètement stupide d'un énergumène dans le public qui devait être vraissemblablement ivre. Ca m'avait découragé.
... Impossible de remettre tout ça en place dans ma tête, ça me reviendra...
Commentaire n°4 posté par François Matton le 25/02/2010 à 13h54
Ah, la mémoire ! Comme un livre sans agraffes, à lire dans un ordre ou un autre. C'était une belle soirée, et vive les énergumènes, même ceux qui ne posent pas de questions !
Réponse de PhA le 25/02/2010 à 17h16
Ah oui, ça y est ! Ca m'est revenu ! Oh la gaffe !!
Bon sang ! Efface vite mon message, il va se reconnaître !
Commentaire n°5 posté par François Matton le 25/02/2010 à 17h50
L'effacer ? Jamais de la vie ! (Zut ! j'ai dû prononcer une formule magique par mégarde :  je l'entends déjà qui arrive, il va te croquer tout cru !)
Réponse de PhA le 25/02/2010 à 18h04
Ah? "il" était P T? Normal! To speak english is more easy when we have a drink!
(Qui çà où çà...;o))
Commentaire n°6 posté par Ambre le 25/02/2010 à 18h11
N'allez surtout pas croire tout ce que raconte l'ami François !
Notre ami, seul parmi une assistance nombreuse et médusée, a osé poser la seule question, la vraie, essentielle, d'ailleurs saluée par l'éditeur pour sa pertinence, et que, zut, j'ai oubliée.
Réponse de PhA le 25/02/2010 à 18h23
Maintenant que tout me revient, bien sûr que ce courageux intervenant (en l'occurrence mon voisin) n'était pas saoul ! C'est juste que je me disais qu'il fallait l'être pour oser se lancer ainsi, seul devant toute une assemblée !
Ah d'ailleurs quelle était bien cette question ! Je ne me souviens plus non plus de son contenu, mais je me souviens qu'elle était parfaite, franche et fière, et qu'elle a fait grand effet.
(C'est après qu'on est aller picoler non ? Ou bien j'étais le seul ? Rrrr la mémoire, la mémoire...)
Commentaire n°7 posté par François Matton le 25/02/2010 à 18h37
Nous avions bien légèrement commencé avant ("bien", pour la qualité, évidemment), mais tu nous l'avais jouée grand travailleur ; et rien ne m'autorise à supputer sur ce que tu as pris avant de nous rejoindre. Ensuite, en effet...
Réponse de PhA le 25/02/2010 à 18h53
Aaaarrrgggrrrr! j'aurais aimé être là; en vrai je me serais un peu P T... pour une fois que je n'aurais pas eu à reprendre ma voiture pour rentrer.
Etre P T c'est quand même mieux que de se la P T hein!
(si vous prenez le métro prenez l'apéro)
Commentaire n°8 posté par Ambre le 25/02/2010 à 18h37
Accrochez-vous, mon sous-marin a du roulis !
Réponse de PhA le 25/02/2010 à 18h54
Bon, ben  Loïs...
Commentaire n°9 posté par Anna de Sandre le 01/03/2010 à 10h38
Eh oui...
Réponse de PhA le 01/03/2010 à 12h24

jeudi 18 février 2010

des avions dans l’air du temps

Riant se leva Romain. Il conta (l’ombre désigne). L’été ramena 740 793. Le nom des êtres englués pendait de 31 768 : le bleu nitré du nom de ce vent par la nuée.
 
L’orateur était programmé sur le mode de la lune. Il ferait paître chaque nuit un nom d’être bleu par l’âne édenté. 32768, ce récit ; l’ombre après seize rations. La dix-septième ferait dire 65536 lettres, et vivrait plus que le roi le plus grand.
 
(Il rive une mule et sa malle. 22 !)
 
Oui : je m’amuse à faire des avions. Le second explique le premier, et s’explique lui-même par la même occasion, mais je vais quand même essayer, une fois n’est pas coutume, d’être plus clair.
C’est chez Frédéric Forte que j’ai appris à faire des avions. (Frédéric Forte est un poète et un blogueur qui achète exactement les mêmes livres que moi. Tenez, voyez plutôt.) Il en pilote lui-même, des avions, comme je disais ; mais l’ingénieur-concepteur, c’est Michelle Grangaud. Pour les paresseux du clic, l’avion, abréviation d’abréviation, est un moyen de raccourcir les distances entre le départ et l’arrivée d’un texte en en supprimant certaines lettres tout en conservant l’ordre des lettres restantes. Oulipo, par exemple, serait un avion d’Ouvroir de Littérature Potentielle (pour ceux ne suivent pas) – si le mot toutefois avait préexisté à la chose.
Je vous donne à lire les originaux des deux avions ci-dessus. J’ai pris quelques libertés avec les accents et la ponctuation ; pour le reste, ça vole tout seul. Je vous mets de la couleur pour plus de clarté (et pour faire joli) :
 
Escrivant se leva à trois heures du matin. Il consulta le nombre des signes. Il avait été ramené à 740793. Le nombre des lettres englouties pendant la nuit était de 31768 : le double, à l’unité ps, du nombre de celles qui avaient disparu la nuit précédente.
 
 
Escrivant crut comprendre : l’ordinateur était programmé sur le modèle de l’apologue indien. Il ferait disparaître chaque nuit un nombre de lettres double de celui qui avait disparu la nuit précédente. 32768, c’était précisément le nombre atteint après seize opérations. La dix-septième ferait disparaître 65536 lettres, et la vingt et unième en avalerait 1048576 : plus que le roman n’en aurait jamais atteint dans les projets les plus grandioses d’Escrivant.
 
(Michel Arrivé, Un bel immeuble, éditions Champ Vallon, 2010, pages 202 et 204.)
 
Ceux qui suivent se souviennent que j’ai déjà évoqué ce roman, dont j’ai d’ailleurs omis de préciser qu’il avait été plagié par anticipation par Georges Perec (entre autres) dans la Vie mode d’emploi. Ce choix évidemment ne doit rien au hasard : nul doute que le virus qui frappe l’orateur, pardon, l’ordinateur de Joël Escrivant et détruit sans pitié son roman est arrivé par avion. Je ne crois pas trahir Joël Escrivant ni Michel Arrivé en livrant ici ces deux extraits d’Un bel immeuble odieusement rétrécis par le virus avionneur. Le thème en effet est récurrent – et profond – chez Michel Arrivé : sa Très vieille petite fille déjà se voyait contrainte de « désécrire » ses mémoires pour pouvoir, croyait-elle, augmenter son espérance de vie.
Je n’ai pas non plus besoin de m’interroger très longuement pour me rendre compte qu’en me livrant à ces modestes réductions de te(x)tes – surtout sur les textes d’un autre –, je ne fais moi-même qu’obéir à mon propre souverain (oui, parfois, pour être sûr de comprendre, il faut cliquer). Nul doute que nos écrans, à Michel Arrivé comme à moi-même, ne remplacent (avantageusement espérons-le) les divans dont personnellement, jusqu’à présent je me dispense.
L’avion en tout cas me paraît, c’est heureux, parfaitement dans l’air du temps ; d’ailleurs je ne suis pas seul à le prendre. En effet, il n’y s’agit pas moins que de recycler des lettres ayant déjà servi, à une époque où le recyclage – des ordures comme des personnes – est plus que jamais à l’ordre du jour. Quant à la compression de l’écrit vers laquelle il tend, elle me paraît parfaitement aller dans le même sens : dans ma bibliothèque les livres sont en double épaisseur, mon disque dur est saturé et ma planète est surpeuplée. Et je ne vous parle pas des rayons des librairies. Si je ne publie pas davantage, c’est juste pour que vous puissiez passer avec votre caddy. Tous les auteurs, hélas, n’ont pas la même délicatesse. J’en avionnerais bien quelques-uns, tiens. En revanche, je vous l’assure, Un bel immeuble vaut bien mieux qu’Une mule.


Commentaires

Il n'est pas né le jour où je prendrai un caddy pour acheter un (des) livre(s)!
Le rayon livres des Leclerc, Carrefour et autre Auchan, non merci.
Vous avez dit Oulipo? Euh, heureusement que vous avez mis en couleurs hein! Déjà qu'avec le fond noir;o) faut des yeux de chat(te)!
(bon, en prenant du temps, j'y arrive)
Commentaire n°1 posté par Ambre le 18/02/2010 à 13h52
Je n'ai mis en rouge que les avions furtifs, qu'on peut lire clairement en tête du billet. Les daltoniens protanopes, eux, ne peuvent lire dans ces textes bicolores que les deux courts extraits du dernier roman de Michel Arrivé - que je vous recommande, d'ailleurs.
Réponse de PhA le 18/02/2010 à 15h37
Je vais comprendre, je dois comprendre, je ne comprends pas, essayer, essayer encore.. (Sans blague, je dois m'y reprendre à X fois...)
Alors... nous avions avion...
Commentaire n°2 posté par Depluloin le 18/02/2010 à 14h47
Ben tiens ! J'espère bien que vous allez comprendre ! Manquerait plus que ça !
Réponse de PhA le 18/02/2010 à 15h38
Joël Escrivant, retiré des voitures, s'est profondément réjoui de lire les avions miraculeusement surgis du Bel immeuble :  il en croyait acquise la totale disparition.
Mais qu'on prenne garde au sort des lettres rouges: elles pourraient peu à peu disparaître, sans forcément faire naître de nouveaux avions d'avions…
Commentaire n°3 posté par Joël Escrivant le 18/02/2010 à 17h59
Un avion d'avion, ce serait du vin, et l'occasion de trinquer (que je ne rate jamais) !
Réponse de PhA le 18/02/2010 à 18h35
Je pense, grosso-modo, avoir compris et me trouve fort marri quant au résultat... je préfère lire un livre avec toutes ses lettres si c'est pour en arriver là... je suis désolée, je ne suis pas convaincue... j'aurais aimé partager l'enthousiasme mais non.
Commentaire n°4 posté par Pascale le 18/02/2010 à 18h11
Alors lis plutôt le Bel immeuble de Michel Arrivé : il n'y manque pas une lettre !
(Les avions sont de moi, et je n'ai pas encore mon brevet de pilote.)
Réponse de PhA le 18/02/2010 à 18h32
Nom d'une pipe, j'y suis arrivée à tout lire en oulipo mais çà veut dire quoi exactement "il rive une mule et sa malle".
(j'aime beaucoup la peinture abstraite;o) mais pour l'écriture j'ai besoin de concrétiser)
Commentaire n°5 posté par Ambre le 18/02/2010 à 20h45
J'imagine qu'il attelle sa mule et attache sa malle sur la bête rétive. Garez-vous !
(Entre nous, il vaut mieux lire l'original.)
En tout cas, maintenant, quand quelqu'un vous dira "J'ai lu ce livre en avion", vous saurez à quoi vous en tenir.
Réponse de PhA le 18/02/2010 à 20h55
Oui... en avion, à côté du hublot, évidemment.
(je lis tellement de chose en ce moment et je viens de commencer "treize mille jours moins un"...) 
Commentaire n°6 posté par Ambre le 18/02/2010 à 21h37
Excellente lecture ! (à ne pas lire en avion toutefois, vous risqueriez d'en faire du riz mou).
Réponse de PhA le 19/02/2010 à 08h23
Je ne supporte pas l'avion depuis une trentaine d'année. Je prenais le train jusqu'à l'apparition des TGV.
Décidément ces exercices me mettent mal à l'aise. Pourtant Perec, Espèce d'espace, et le reste... Ah les vieux!
Commentaire n°7 posté par Depluloin le 19/02/2010 à 10h45
Ah, Monsieur n'aime pas faire de l'exercice...
Sérieusement, ce n'est pas l'exercice qui vaut mais ce qu'on en fait. Pour ma part, comme je le disais, je n'ai fait qu'"obéir à mon souverain", et ce Seul à voir-là dit bien combien je préfèrerais écrire plutôt que de désécrire les textes d'un autre. Mais dans notre monde moderne, je trouve que ça fait sens. C'est que je suis un auteur engagé, moi ; une sorte de prophète politique. Non ?
Réponse de PhA le 19/02/2010 à 13h22
"Décidément ces exercices me mettent mal à l'aise. Pourtant Perec, Espèce d'espace, et le reste... Ah les vieux!"
(tout pareil que vous Depluloin mais je n'osais pas le dire;o))
Commentaire n°8 posté par Ambre le 19/02/2010 à 11h16
Bis repetita.
Réponse de PhA le 19/02/2010 à 13h24
Et Joel Escrivant en cocotte en papier, vous seriez cap de le faire? Car l'origami est une science exacte de la litterature, comme nous le montre quotidiennement Juliette Mezenc
Commentaire n°9 posté par petite racine le 19/02/2010 à 15h05
Ah, les cocottes, pas mon fort ! D'ailleurs je n'ai même jamais été fichu de faire un avion en papier qui vole bien. Je connais le beau blog de Juliette Mezenc mais je n'y pas encore lu d'explications pratiques pour réussir les avions en papier.
Réponse de PhA le 19/02/2010 à 19h04
Escrivant, Arrivé, que de beaux noms..., nom de nom !

Mais :

AN(nouvel)nocque

AnNOC (at the Heaven's Gate)que

AnnocQUE (de comète)...

ce n'est pas mal non plus !
Commentaire n°10 posté par Dominique Hasselmann le 19/02/2010 à 16h05
"Annocque", vous trouvez ? Quand mon père s'est présenté à ma mère, la première chose qu'elle a pensé, c'est "quel drôle de nom !" Et c'est exactement par ces mots que commençait le premier article que j'ai eu dans les Inrockuptibles. (Mais de toutes façons, j'ai toujours eu un problème avec les noms.)
Réponse de PhA le 19/02/2010 à 19h01
Je n'ai absolument rien compris : (
Commentaire n°11 posté par François Matton le 19/02/2010 à 17h33
Alors, voilà. Michel Arrivé est l'auteur d'un très chouette roman dans lequel Joël Escrivant est l'auteur d'un non moins chouette roman évoquant la vie des habitants d'un bel immeuble. Malheureusement pour notre auteur bien nommé, son roman se voit petit à petit détruit par un problème informatique de son traitement de texte qui efface chaque jour un nombre croissant de lettres. (Ce n'est d'ailleurs là qu'un aspect du roman, sur lequel il y aurait bien plus à dire.)
Ayant découvert récemment la pratique de l'avion, qui correspond joliment à une injonction royale évoquée en Seul à voir (pour tout comprendre il faut cliquer), j'ai repensé à ce roman, pour des raisons évidentes liées à l'un de ses sujets, afin de m'initier au pilotage, sans grand succès il est vrai. (Il est vrai aussi que Michel Arrivé aurait quand même pu prévoir que je m'amuserais à faire des avions avec son roman !)
(Bon, c'est bien parce que tu as de la fièvre que je t'explique tout ça.)
Réponse de PhA le 19/02/2010 à 18h57
Rien n'est perdu, Philippe : j'ai mon Bel Immeuble et je sens que je vais me régaler! (Pourquoi François Matton me rassure toujours?! ^^)
Commentaire n°12 posté par Depluloin le 19/02/2010 à 19h11
Bon appétit !
(C'est peut-être quand François a la fièvre qu'il est le plus rassurant.)
Réponse de PhA le 19/02/2010 à 20h30
Oh, merci Philippe pour ces explications. Je n'aurais jamais pensé que ... bon, quoi qu'il en soit, merci !
Commentaire n°13 posté par François Matton le 19/02/2010 à 21h54
ça va mieux ?
Réponse de PhA le 19/02/2010 à 22h11
"si toutefois le mot avait préexister à la chose" - rêve d'écrivain! quel tête aurait (ferait) le monde alors!
Commentaire n°14 posté par Aléna le 21/02/2010 à 22h23
Si le mot avait préexisté à la chose, on l'aurait appelé le verbe.
Réponse de PhA le 21/02/2010 à 23h04

samedi 13 février 2010

voir suppose une petite fissure

Si je vous lis de mon œil droit c’est parce que j’y vois mieux encore pour lire qu’avec le gauche qui pourtant se défend ; en revanche si le gauche n’est que légèrement myope le droit à distance a décidé, la quarantaine passée, de voir le monde flou – sauf quand (et c’est très souvent que j’en fais l’expérience) je joins les extrémités de mes deux pouces et de mes deux index et ne laisse libre qu’un minuscule carré, un millimètre environ de côté, par lequel une toute petite portion du monde d’un coup revient à la netteté d’autrefois.
 
« voir suppose une petite fissure et commencer à peindre exige de percer un trou, un seul suffit pour faire une passoire, à travers on regarde l’histoire, le monde ou son reflet, son écran est une vitre sans tain, le tableau est une fenêtre qui s’ouvre comme une orange. »
 
« Plus on regarde l’œil fixe et grand ouvert moins on voit, blanc sur blanc un gouffre libre ou noir sur noir illimité, il se trouve sans doute quelque manigance là-dessous. »
 
« Le silence est différent de tous les autres silences, la lueur mate de toutes les autres lueurs, tire carrément sur le violet comme avant une catastrophe, l’horizon change d’apparence et les sentiments s’éclipsent. Un jour j’inventerai un film en regardant le soleil, un film sur sa méchanceté ou ses qualités sensibles – mais on n’en voit la grandeur et la trame que lorsqu’il s’efface dans l’ombre portée de la lune, quitte à y perdre la vue. »
 
 
Entre ces guillemets quelques toutes petites portions de Lazy Suzie, de Suzanne Doppelt, paru en novembre 2009 chez POL, et dont Fabrice Thumerel et Alain Nicolas vous donneront une idée moins floue



Commentaires

Et c'est seulement maintenant, grâce à ce billet, que je me rends compte que mes Hublots sont très légèrement plus flous sous Internet Explorer que sous Firefox.
Commentaire n°1 posté par PhA le 13/02/2010 à 21h07
Si "la visibilité est mauvaise" notre champ visuel doit être au top pour tout voir dans ces hublots!

J'aime bien les "portions" que vous avez sélectionnées, je vais aller voir plus avant ce que l'on dit de ce livre et de Suzanne Doppelt.
Commentaire n°2 posté par Ambre le 13/02/2010 à 22h06
Vous avez raison : il faut voir.
Réponse de PhA le 14/02/2010 à 11h38
Oui, j'ai vu! Ce livre est sûrement passionnant poour des lecteurs "éclairés". Il me semble trop "savant" pour moi mais, en même temps, il parle aussi de l'ego, et bien sûr, cela m'intéresse;o)
Commentaire n°3 posté par Ambre le 14/02/2010 à 12h14
Trop savant ? Mais non, il y a même des images !
Réponse de PhA le 14/02/2010 à 17h37
Des images? d'anamorphose je suppose! Pour les livres d'images je préfère François Matton;o)
Commentaire n°4 posté par Ambre le 14/02/2010 à 17h48
Eh bien justement, voyez donc ici, ou même (à propos de l'attention portée aux choses), et encore ailleurs...
Réponse de PhA le 14/02/2010 à 18h06
Oh mais c'est merveilleux!!!! Je ne croyais pas si bien dire en effet! Voilà qui va me décider à lire Suzanne Doppelt!
Merci Philippe.
Commentaire n°5 posté par Ambre le 14/02/2010 à 18h13
Pour tout savoir sur l'oculisme, et, peut-être, sur l'occultisme,

lire LES YEUX, de Jean-Luc Parant.

On en ressort aveuglé, absolument.
Commentaire n°6 posté par Dominique Hasselmann le 15/02/2010 à 08h44
Ah ! Je retiens (tant que j'y vois encore un peu).
Réponse de PhA le 15/02/2010 à 08h53
Paru chez José Corti en 2002 (j'ignore s'il est encore disponible, visible et lisible donc, ou si réédité en poche).

Celui que je vois, là, regardez bien la couverture blanche avec cette étoile rouge et l'inscription "Rien de commun", est sous-titré : L'Envahissement des yeux.

C'est même un livre qui fait peur, on ferme les paupières.
Commentaire n°7 posté par Dominique Hasselmann le 15/02/2010 à 09h08

mercredi 10 février 2010

on voit aussi sans les yeux

Moi aussi, j’ai une vie mondaine. Hier, je suis sorti du bois. J’ai rejoint la gare à pied, sous la neige, comme Herbert, mais je n’y ai pas pensé. Pas pensé non plus à mettre sur mes oreilles le bonnet du fiston, devenu trop petit pour lui, alors pour ma grosse tête… J’aurais dû pourtant, je l’ai senti, sur le quai de la gare ; il était trop tard. Ça ne trompe pas, les pommettes qui remontent, les joues qui se creusent, le bourrelet du lion entre les sourcils, on les sent venir même sans les voir. Dans le compartiment, comme un fait exprès, un miroir en face de moi. Pour que je le voie bien, bien en face : je n’étais plus moi-même. En face, c’était  l’autre, que je connais déjà, pour l’avoir déjà vu au sortir du froid. Ça pourrait exister, un type avec cette tronche-là, rien d’extraordinaire – sauf que ce n’est pas moi. Quand je le vois, je pense aux Enfers. Heureusement, avec moi dans le compartiment, personne de connaissance : personne pour ne pas me reconnaître. Ce Mr Hyde en moi, ou Hulk au choix (car j’ai lu Stan Lee plus encore que Stevenson), mais pas plus méchant ni plus fort, juste bien absurde, c’est une urticaire au froid. Ça passe. Le temps du trajet, un peu. Pour une fois on prendra le métro, à Paris. Rendez-vous avec un ami qu’on n’a jamais vu : autant lui montrer la vraie tête, pas l’occasionnelle. Heureusement, j’ai de l’avance, les librairies m’appellent, ne serait-ce que pour le paysage ; acheter n’est plus vraiment raisonnable quand lire tend à écoper l’étagère qui sert de table de nuit. Par-dessus la table aux nouveautés, un regard familier. Rencontre fortuite et improbable. On se reconnaît. Pourtant, si l’on compte bien, ça fait bien vingt-cinq ans qu’on ne s’est pas vus. Camarades de faculté. Pas surpris pour ma part de si facilement la reconnaître : je n’ai jamais vu le temps passer. Qu’elle me reconnaisse me rassure ; c’est que Hulk, mon urticaire, a passé. Pour le reste, je sais que je n’ai pas changé, et compte pour rien les cheveux que je n’ai plus ; ils n’en méritent pas davantage. Plus tard, au café où je n’étais plus entré depuis plus de vingt ans, je reconnais d’évidence l’ami que je n’ai jamais vu ; c’est donc qu’on voit aussi sans les yeux. La suite est privée, comme ma vie mondaine, mais chouette, salut les potes ; à minuit appelez-moi Cendrillon, je préfère, c’est le dernier train. Au retour de la gare, on ne sent pas le gel sous les étoiles, pourtant par terre ça brille. S’arrêter pour regarder le ciel, c’est un luxe, mais rien n’est trop cher pour ma bourse. Je sens que je n’ai rien à craindre. A la maison, la porte refermée, c’est bien moi que je vois dans la glace.
 

Commentaires

Ouf! Quel suspens! La prochaine fois, passez donc dans le quartier! Ce n'est pas tous les jours qu'on peut voir Hulk en chair et en os!
Commentaire n°1 posté par Depluloin le 10/02/2010 à 17h45
J'ai bien failli vous faire ce plaisir - et vous en auriez tremblé !
Réponse de PhA le 10/02/2010 à 18h13
Imaginez que vous ayez vu BHL dans la glace : sacrée surprise !
Commentaire n°2 posté par Dominique Hasselmann le 10/02/2010 à 17h57
Aucun risque : mon urticaire n'a rien à voir avec le botulisme.
Réponse de PhA le 10/02/2010 à 18h15
Je suis donc rassuré sur votre santé mentale !
Commentaire n°3 posté par Dominique Hasselmann le 10/02/2010 à 18h16
La santé, chez moi, est très spécialisée.
Réponse de PhA le 10/02/2010 à 18h20
Je recommence, une mauvaise manip a tout annulé. C'est terrible de réécrire ce qu'on avait dit dans la spontanéité. Vais pas tout redire. Re-dire me paraît soudain impossible. Pourtant c'était beau comme cette "reconnaissance de l'ami que vous n'aviez jamais vu".
Je me dis maintenant qu'il n'y a pas de hasard et qu'il était écrit que ce commentaire devait disparaître.
Commentaire n°4 posté par Ambre le 10/02/2010 à 19h02
A chaque fois que ça m'arrive ça me fait rager aussi. (Mais je ne vire pas au vert.)
Réponse de PhA le 10/02/2010 à 19h23
C'est le froid qui vous vire au vert!
(J'espère que lorsque je viendrai me faire dédicacer votre prochain livre je ne virerai pas au rouge...)
L'uticaire au froid! Vous avez un remèdde qui apaise? (Sans blague). 
Commentaire n°5 posté par Ambre le 10/02/2010 à 20h07
En principe un antihistaminique suffit. (Mais je n'en prends presque jamais.)
Réponse de PhA le 10/02/2010 à 20h25
"acheter n’est plus vraiment raisonnable quand lire tend à écoper l’étagère qui sert de table de nuit", il faudra pourtant  pour mieux connaître Herbert "esthète collectionneur" ou son double, ou... et se laisser aller à la tentation de se laisser dérouter.
Commentaire n°6 posté par Elise le 10/02/2010 à 21h48
On le dit épuisé, celui-là ; mais il paraîtrait qu'il doive retrouver une nouvelle jeunesse avant la fin de l'année. (D'ailleurs j'ai beau moi-même faire mon raisonnable, je cache honteusement dans mon billet qu'en réalité je suis ressorti une fois de plus avec deux bouquins sous le bras. Mensonge par omission : j'avais résisté à la première librairie, j'ai succombé à la deuxième. Misère !)
Réponse de PhA le 10/02/2010 à 22h10
Merci Docteur Jekyll!
Marre de la cortisone ce soir je me shoote à la polaramine.
Commentaire n°7 posté par Ambre le 10/02/2010 à 21h58
Hum ! Allez-y doucement quand même.
Réponse de PhA le 10/02/2010 à 22h11
Nos visages qui fendent le froid, se transforment en têtes terribles, veineuses et alors - vous le savez - elles virent au vert.
http://francoisquinqua.skynetblogs.be/post/.../bram-van-velde
Commentaire n°8 posté par Gilbert Pinna, le blog graphique le 10/02/2010 à 22h15
Chez moi la transformation est vraiment spectaculaire. J'oubliais les oreilles, qui en quelques minutes deviennent pareilles à celles d'un catcheur. La tête d'un à qui on ne cherchera pas querelle, vraiment. (Je ne vois pas le billet de votre lien : c'est tout noir, BizArt. En plus j'aime vraiment beaucoup Bram Van Velde... Attendez, ce doit être, mais oui, voilà !)
Réponse de PhA le 10/02/2010 à 22h29
Parfaitement, on voit très bien sans les yeux.
Dites, je ne savais pas qu'on dit une urticaire. Merci, grâce à vous, maintenant, je le sais.
Commentaire n°9 posté par Anna de Sandre le 10/02/2010 à 22h30
C'est que vous avez affaire à un spécialiste. Pas seulement de la grammaire.
(Pour être honnête, je crois bien qu'il y a de l'urticaire dans un de mes bouquins ; mais alors je ne pourrais vraiment pas vous dire dans lequel.)
Réponse de PhA le 10/02/2010 à 22h35
@ Gilbert Pinna. Incroyable le Bram van Velde Sans titre de 1954. Magnifique. Merci pour ce lien, encore une belle découverte.

Commentaire n°10 posté par Ambre le 10/02/2010 à 22h31
Si vous en avez l'occasion, lisez donc les articles que Beckett a consacrés à Van Velde : Peintres de l'empêchement et le Monde et le pantalon, si ma mémoire est bonne.
Réponse de PhA le 10/02/2010 à 22h39
C'est de celui-ci que je parle
http://francoisquinqua.skynetblogs.be/post/7652147/bram-van-velde
Arrrgggrrr encore des livres à lire...
Je viens pourtant de lire tous vos livres récemment. L'urticaire? Je me demande si ce n'est pas dans Les chroniques imaginaires...
Commentaire n°11 posté par Ambre le 10/02/2010 à 22h53
Mais je confonds peut-être avec CHOIR et ses habitants qui se savonnent à l'ortie (rires)- (enfin, c'est mon interprétation)
Commentaire n°12 posté par Ambre le 10/02/2010 à 22h57
Cendrillon a bien changé ! Un oedème en guise de diadème...
(Mondain, mondain, tu exagères ! Ca l'était fort peu, dieu merci.)
Commentaire n°13 posté par Didier da le 11/02/2010 à 09h52
(Une vie mondaine, ce n'est pas de marcher sur Terre et de rencontrer ses habitants ?)
Réponse de PhA le 11/02/2010 à 13h08
Je l'aurai parié cette rencontre! Halte-là, ce silence... mais c'est bien sûr...
Cà m'enchante de savoir que des "amitiés" (le mot est sans doute un peu fort, disons des "cordialités") virtuelles peuvent aussi, parfois, passer au réel.
Commentaire n°14 posté par Ambre le 11/02/2010 à 11h36
Dans ta glace, tu étais déjà au parfum ?.. Bonne soirée et merci pour la visite...
Commentaire n°15 posté par JEB le 11/02/2010 à 19h56

lundi 8 février 2010

les voix de Céline Minard

Après ta mort, le masque bougeait encore. Ton corps crevé, pourrissant vert, omnia foe­tida, dans un réduit du Quirinal, veillé par les rats et deux bougies de graisse, les pieds plats, dépouillé jusqu’à la chemise, ton corps mas­quait encore mon pouvoir, les trente voyages en litière que je fis entre le Vatican et mon palais place Navonne, les papiers que je pris, que je camouflai, le liquide qui devait encore couler et passer le Tibre jusqu’à mon lit, coula.
J’ai partagé ton enclos puant, je t’ai main­tenu aux yeux du monde, maintenu vivant, trois jours de long, je t’ai tenu devant ma face à bout de bras par ma force, ma force seule, ma seule force, par ma force.
Je t’ai soutenu Didi, alors que tes traits s’ef­fondraient dans ta chair. Quelle épouse, quel amant, quelle mère, quel maître, quelle putain pourrait en dire autant ? Quel amour ?
Que la louve du Capitole tombe en mélasse sur les deux homoncules du fondement de Rome si je mens ! Rien en toi n’aurait été grand sans mon pouvoir, pas même ton nez.
 
Céline Minard, Olimpia, Denoël, 2010, p. 28-29
 
 
Olimpia Maidalchini naquit à Viterbe le 26 mai 1592 – ou selon une tradition moins sûre puisqu’elle en fut la source, le 26 mai 1594 – de Sforza et Vittoria Gualtieri.
Son père fut un administrateur borné aux ordres d’un Gualtieri plus chanceux, et sa mère un tendron rose et blanc auquel ne manquait ni la cour ni la pourpre de Rome qu’elle situait aux confins du monde vivant. Leur société tenait dans trois rues et quelques relations en rapport à leur envergure, dont la plus influente était monsieur le curé et secondement le cousin Giulio qui portait les gants le dimanche. De pauvre culture et de médiocres moyens, les Gualtieri n’en connaissaient pas moins les usages, ils placèrent leur fille au couvent San Domenico quand elle eut passé sept ans. Elle y fut grossièrement alphabétisée sous la double férule des sœurs Orsola et Margherita Vittoria, et soit d’instinct soit pour avoir observé certaines contradictions entre la règle et son application, elle en conserva une grande méfiance pour les choses écrites. Cette instruction la dota des connaissances lacunaires propres à la noblesse du temps et de la faculté de se mouvoir avec grâce parmi les habits ecclésiastiques. La piquante désinvolture dont elle fit montre aux pâques de 1604 révolutionna Viterbe et lui valut deux jours de sermon. C’était son premier succès public et l’ivresse jalouse qu’elle vit dans les yeux des sœurs décida de sa vocation. Elle deviendrait sainte à Rome, pêcheuse d’hommes comme Simon, elle multiplierait les pains dorés et tous la suivraient, la servant comme une reine. Cinquante-trois ans plus tard, au seuil de mourir dans un palais déserté, elle se rappellerait ce vœu avec le contentement des esprits dont le destin s’est accompli.
 
Céline Minard, Olimpia, Denoël, 2010, p. 67-68
 
Décidément, j’aime les voix de Céline Minard. (Il paraît même que l’une de ses voix s’appellera Nathalie Richard le vendredi 19 février, lis-je ici.)


Commentaires

Une fort belle voix ici en effet, pour les autres Albin àctheurci vous croit sur parole.
 
Commentaire n°1 posté par albin le 08/02/2010 à 11h45
Si si, écoutez bien : elle en a deux ici, et une autre encore sous "Décidément" (sans parler de celles que je n'ai pas encore écoutées).
Réponse de PhA le 08/02/2010 à 11h48
Il est rare de voir une photo d'Olivier Roller qui ne soit pas un gros plan. Il est sans doute rare aussi de lire une "voix" aussi singulière que ce que vous nous en dites.
Commentaire n°2 posté par Dominique Hasselmann le 09/02/2010 à 08h57
Il y a deux autres photos sous le lien "Olivier Roller" ; j'ai longtemps hésité : non contente de ses belles voix (avez-vous lu Bastard Battle ? c'était déjà à tout casser), c'est aussi un beau sujet.
Réponse de PhA le 09/02/2010 à 09h16
Non, jamais rien lu d'elle... mais vous y invitez !
Commentaire n°3 posté par Dominique Hasselmann le 09/02/2010 à 09h22
Bastard Battle, Le dernier monde, et maintenant ce bouquin aussi puissant qu'improbable : oui, Céline Minard est vraiment une grande... Et Bastard Battle si possible le lire dans la version noire, petit livre aux inventions typo époustouflantes.
Commentaire n°4 posté par petite racine le 09/02/2010 à 09h59
Veinarde ! Moi je l'ai lu dans la version tout public. Mais j'ai la Manadologie qui m'attend sur ma table de nuit.
Réponse de PhA le 09/02/2010 à 10h37
"J’ai partagé ton enclos puant, je t’ai main­tenu aux yeux du monde, maintenu vivant, trois jours de long ", j'ai lu : "...trois jours de blog..." . Je sens que je m'égare...
Commentaire n°5 posté par Gilbert Pinna, le blog graphique le 10/02/2010 à 16h16
Attention au surblogage !
Réponse de PhA le 10/02/2010 à 17h23

samedi 6 février 2010

comment me voient les nuages

comment me voient les nuages

 

Commentaires

Mais il semble que les nuages lisent vous comme à livre ouvert!!
Commentaire n°1 posté par Depluloin le 06/02/2010 à 16h53
N'est-ce pas ? Levons les yeux et nous saurons qui nous sommes.
Réponse de PhA le 06/02/2010 à 17h11
Tout à l'heure, suis sorti, ai levé les yeux vers le ciel. Une fiente de pigeon m'est tombée sur l'épaule. Je conclus...?
Commentaire n°2 posté par Gilbert Pinna, le blog graphique le 06/02/2010 à 17h57
Que, pour une fois, vous n'étiez pas l'artiste mais la page ou la toile elle-même.
Réponse de PhA le 06/02/2010 à 18h07
Merci Philippe. je respire.
Commentaire n°3 posté par Gilbert Pinna, le blog graphique le 06/02/2010 à 18h13
C'est toujours sain, ces inversions des rôles. On en ressort plus averti. Un jour, une méduse m'a expliqué ce qu'éprouve la feuille blanche au moment précis où elle passe dans l'imprimante. J'ai même gardé l'explication gravée sur mon bras durant plusieurs semaines, pour le cas où j'aurais du mal à comprendre. (Ce n'était pas du luxe : les méduses de cette espèce utilisent en effet un alphabet plus ou moins cunéiforme très efficace mais qui recommande des études assez poussées.)
Réponse de PhA le 06/02/2010 à 18h45
En tout cas, vu des nuages, la visibilité n'est pas si mauvaise!
Commentaire n°4 posté par Depluloin le 06/02/2010 à 19h09
Avec une petite lacune toutefois, qui d'ailleurs s'explique fort bien : on ne peut pas compter sur les nuages pour voir par temps clair.
Réponse de PhA le 06/02/2010 à 19h29
Par temps clair semble occulté... trop souvent.
(je me demande pourquoi. Je l'ai vraiment aimé)
"Levons les yeux...". Je vois souvent des visages dans les nuages. 
Commentaire n°5 posté par Ambre le 06/02/2010 à 21h18
Les nuages vous diront qu'ils n'aiment pas le temps clair.
Plus près du sol, on dira qu'il n'a pas été publié dans les meilleures conditions.
(Moi aussi, je l'ai beaucoup aimé.)
Réponse de PhA le 07/02/2010 à 01h00
se dessine - à juste titre - le regard liquide d'un fleuve (au fait : ça va, j'ai laissé la salle de bain bien toute propre en ordre ?)
Commentaire n°6 posté par L'employée aux écritures le 06/02/2010 à 21h47
(Où est passé le dentifrice ?)
(C'était une belle expérience, encore merci !)
Réponse de PhA le 07/02/2010 à 01h02
Ils nous voient tout petit
Commentaire n°7 posté par jc le 06/02/2010 à 22h23
ou pareils à eux-mêmes.
Réponse de PhA le 07/02/2010 à 01h02