mercredi 1 juin 2011

Xavier Person arrange des rencontres aux abords des points d’eau

UNE ELLIPSE RAVIVE LE SOUVENIR DES SCÈNES ABSENTES
 
La répétition d’un rêve n’est pas exactement ce rêve, son récit est un rêve, te retrouver était ce que je recherchais dans cette phrase qui du coup s’élargissait à un autre rêve que mon rêve, mais plus près, d’un coup s’en rapprochant, je suis nu et je ne vois pas quoi te dire, comme si nous n’avions plus pour nous que la surface de nous-mêmes, nous faisons l’amour sans parfois terminer une phrase, sans toujours voir que cette phrase n’explique rien ou si peu, j’ai parlé trop tôt et trop vite et de notre élan cette phrase fait partie, elle est ce sur quoi, ce à partir de quoi les mots viennent, même si nous disons je t’aime des milliers de fois, même si, me disais-je, tout se défait dans une lueur où je pourrais vouloir crier, même si je ne reviendrai jamais en arrière, c’est promis, dans aucune phrase, maintenant que tout s’accélère que je reconnais ce rythme, ce ton, je ne peux pas dire le contraire, je ne peux pas te dire comment je me suis endormi dans cette phrase, elle dure encore, dans à peu près toutes les phrases.
 
  
UN BLANC SI LONG QUE L’EFFET DE RÉEL A ETE MODIFIÉ
 
Une photographie aérienne
n’ensevelit pas tout
considère l’envol d’un héron
question posée pour rien
une seconde négation cherchait à retourner la première sur elle-même
on ne sautait pas, ne sachant pas d’où on aurait pu sauter
on arrachait tout
dans trop de lumière et plus d’yeux
une tache noire ne dure pas si longtemps
une forme imprévisible cherchait à sauver quoi
une fois tel ou tel mot supprimé
je cherchais, me disais-je, à remonter jusqu’au point de départ de la sensation d’un amour.
 
Xavier Person, Extravague, Le Bleu du Ciel, 2009, pages 46 et 47.
 
 
Ça me rappelle la première fois où j’ai vu un ptérodactyle. Je devrais plutôt dire la seule fois. Et puis je devrais dire « la fois où j’ai entendu un ptérodactyle », car c’est en l’entendant que je l’ai reconnu. C’est pour ça aussi, dans l’espoir d’en revoir un, que je retourne de temps en temps à la Bonne Mare. J’étais seul bien sûr, on a peu de chance de voir des ptérodactyles quand on se promène en compagnie, et en débouchant sur la Bonne Mare (on ne peut que déboucher sur la Bonne Mare, à vingt mètres elle est encore insoupçonnable), j’ai entendu, j’ai vu le héron s’envoler de son vol lourd, son envergure était telle que pour éviter les arbres il était obligé d’aller en cercle au-dessus de la mare, quand il a crié son cri est venu de très loin : c’est là que j’ai reconnu le ptérodactyle. C’est son point de vue de la Bonne Mare qui illustre ce billet.
Je ne dois pas m’étonner que Xavier Person arrange des rencontres aux abords des points d’eau, me confirme Didier da.
Sur Extravague, il y a aussi ce bel article de Marc Villemain paru dans le Magazine des Livres.

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