mardi 27 mars 2012

Roman de plage, de Philippe Garnier.


Sous les rochers, la plage ?
 
De loin, le décor est celui de ces « vacances de rêve » des cartes postales à ciel turquoise : un club en bord de mer sur une plage vénézuélienne. Pourtant les vacances qu’y passe Stéphane, un français divorcé d’une femme du pays, sorte de looser-né plutôt attendrissant, en compagnie de son fils Pablo qu’il ne voit que quelques semaines par an, tiennent plutôt du cauchemar ; et ce Roman de plage de Philippe Garnier n’a de « roman de plage » que le titre.
A l’image de ce titre volontairement trompeur et en même temps objectivement indiscutable, l’ambiance au club ne ressemble pas à ce à quoi on s’attendrait : la vie des vacanciers y a clairement quelque chose de carcéral, et ce avant même que l’intrigue se noue. S’y retrouve un monde clos, replié sur lui-même, pathologiquement attaché à ses souvenirs et à ses privilèges menacés, en proie à une peur paranoïaque de l’extérieur – c’est-à-dire surtout des dérives du nouveau régime, celui de Chávez, présenté sous ses aspects les plus noirs. A cela s’ajoutent le traumatisant souvenir d’enfants disparus, la menace récurrente de glissements de terrain et d’éboulements de rochers destructeurs.
Dans le désir inconscient d’échapper à la névrose de leurs parents, les enfants forment au sein du club une sorte de microsociété à eux, opaque, dont sont exclus les adultes, et dans laquelle Stéphane observe avec envie son fils se fondre sans peine – un fils avec lequel la conversation se limite à quelques mots, et qu’il n’est même plus certain de reconnaître dès lors que celui-ci est en maillot de bain et porte ses lunettes de piscine.
En fait, ce qui est troublant, à la lecture de ce livre, c’est que les choses ne semblent pas être ce qu’elles devraient être. On vit dans une atmosphère de cauchemar, d’incompréhension parfois comique – on pense parfois à Kafka, et on se souvient alors que Philippe Garnier était déjà l’auteur d’un petit livre étrange et fort, Mon père s’est perdu au fond du couloir, paru chez Melville en 2005 – et en même temps tout cela s’inscrit dans un cadre historique et géographique clairement défini, et l’on est bien obligé de reconnaître que les événements racontés sont « objectivement » tout à fait plausibles. De l’art discret de transformer un roman réaliste, à la narration classique, en tout autre chose.
 
Mars 2008.
Roman-de-plage.jpg
Roman de plage est paru en 2007 aux éditions Denoël. Philippe Garnier est aussi l’auteur du tout récent  Babel nuit, qui vient de paraître chez Verticales.

lundi 26 mars 2012

Il y a de, de Gabriel Bergounioux.

Il y a de l’Iliade sans héros ni soleil.
 
 
Après Il y a un, paru en 2004, Il y a de poursuit l’évocation d’une guerre sans nom, abstraite et invisible. On y retrouve le même héros narrateur, figure dérisoire de l’aède aveugle (opérateur radio), plutôt témoin que héros, plutôt chambre d’écho que narrateur, par la voix duquel se répercute la rumeur du monde. Le monde, cette fois, c’est l’intérieur d’un navire enfin à flot – sur le départ duquel s’arrêtait Il y a un – participant, à ce qu’il paraît, au blocus d’une citadelle peut-être imaginaire. Le temps y passe, que rien ne nous permet de mesurer, sinon l’insidieuse et progressive dégradation des conditions de vie de l’équipage, ignorant de sa mission, de son destin, de plus en plus laissé à lui-même, jusqu’à générer sa propre hiérarchie mafieuse, dirigée par des caïds rivaux ou alliés de circonstance.
La thématique, cette tension vers un horizon où rien n’apparaît, n’est pas sans rappeler Le Rivage des Syrtes ou Un balcon en forêt. L’écriture, en revanche, est loin de celle de Gracq. Le texte vit des paroles entendues par le narrateur aveugle, qui sont intégrées dans un discours à la fois intérieur et polyphonique, d’une belle et rugueuse oralité.
Disons-le tout net : rares sont les textes, découverts au prix d’un patient défrichage, dont la lecture a un effet aussi physique. Réveillé en pleine nuit d’un probable cauchemar, il m’a fallu un temps pour sentir qu’à la faveur du sommeil je m’étais simplement laissé embarquer par un Charon encore méconnu aux portes d’Enfers innommés.
Revenu avec l’aube à plus de lucidité, c’est avec une impatience achéenne qu’on se surprend à rêver, après « Il y a un », après « Il y a de(ux ?) », d’un « Il y a trois » – Il y a Troie ? – plus sombre encore.
 
Décembre 2006.
 
Il-y-a-de.jpg  
De Gabriel Bergounioux chez Champ vallon, outre Il y a un dont Il y a de est la suite, il faut aussi lire Doucement et le tout récent Mes nippes.

samedi 24 mars 2012

Babel nuit, de Philippe Garnier.


entre kok et ûûûûûûûû
 
L’enfance du narrateur – innommé d’un bout à l’autre du livre – n’aura été qu’un long Epépé en privé, jamais reconnu par quiconque : il n’a jamais compris un mot de la bouche de ses parents, qui eux-mêmes, parfaitement opaques au regard de leur enfant, n’ont jamais eu l’air de s’en rendre compte. Le père semble emprunter ses syllabes kok yeksshh achiakawa ahahalaala è vero whagg aux langues les plus variées tandis que la mère module et étire un long ûûûûûûûû sans fin. N’ont jamais eu l’air de s’en rendre compte jusqu’à qu’à un certain jour, car un beau soir tout de même : Tu comprends ce que je dis ? Et comme la réponse tarde à venir : Tu entends quand je te parle ? Mais le narrateur a déjà trente-huit ans, son père est mort et sa mère est une vieille dame qui depuis son fauteuil pour une fois ne dit pas ûûûûûûûû. Ce discours soudain intelligible (soudaineté apparente : le narrateur n’a-t-il pas été jusque là sujet à un empêchement de la compréhension ?) est l’événement déclencheur d’un récit d’une très simple unité temporelle, de la fin d’un jour au matin du lendemain : une errance parisienne et une succession de rencontres qui à chaque fois donne au narrateur l’espoir de pouvoir enfin raconter son histoire à quelqu’un, tandis qu’en face de lui l’interlocuteur comprend autre chose, l’interlocutrice s’endort et que le protagoniste reste seul à considérer sa propre érection durable et vaine. Comme à chaque fois chez Philippe Garnier (cf ici et ) ce qui est dit, les situations dans lesquels se retrouve le héros (quelques-unes sont évoquées en quatrième de couverture, ça m’évitera de vous les résumer), tout cela est à la fois cocasse et mystérieux. Mais tout cela surtout déborde d’inquiétude. On ne peut pas faire confiance à ce qu’on entend ; la femme à laquelle enfin on s’abandonne n’est qu’un résumé de toutes les autres et sa compréhension quasi extralucide l’empêcherait d’exister aux yeux du narrateur sans l’abandon aveugle de celui-ci ; quant à autrui, comment être sûr qu’il n’est pas mieux nous-même que nous ne le sommes ?
Babel nuit vient de paraître aux éditions Verticales.
http://www.editions-verticales.com/data/GrandeCouv/344.jpg

 

Commentaires

Je lisais régulièrement les chroniques de Philippe Garnier dans "Libé" : toujours à haut degré, comme un parfum de "beat generation" (perdue ou éperdue).
Et maintenant il s'est concentré dans la pure littérature comme il y a du whisky pur malt, à cacher dans un sac en papier (la bouteille ou les pages), genre kraft ou plus simplement tout blanc.
Commentaire n°1 posté par Dominique Hasselmann le 24/03/2012 à 11h33
Non non, Dominique ; il ne s'agit pas de Philippe Garnier, mais de Philippe Garnier. D'ailleurs il y a désormais, dans les livres de Philippe Garnier, à côté de la rubrique "du même auteur", une rubrique "pas du même auteur", où figurent les livres de Philippe Garnier, qui fait de même dans ses propres livres. Tu me suis ?
Réponse de PhA le 24/03/2012 à 11h59
D'accord, Philippe, je croyais qu'il s'agissait de Philippe Annocque, en fait.
Commentaire n°2 posté par Dominique Hasselmann le 24/03/2012 à 12h34
Il y a comme une parenté aussi.
Réponse de PhA le 26/03/2012 à 08h36

jeudi 22 mars 2012

Il y a un, de Gabriel Bergounioux.

Guerre sans nom
 
Dans un pays innommé qui ressemble au nôtre, à une époque innommée qui ressemble à la nôtre, la guerre éclate. Une conscience indécise, celle d’un enfant, perçoit la rumeur du monde. Le texte est une merveille de polyphonie : des voix diverses s’y font entendre, celle de la mère, qui après le départ du père appelé, doit faire de la couture pour faire vivre le foyer, les voix des voisins, des amis, des anonymes. C’est que, le lecteur peu à peu le comprend, l’enfant narrateur est aveugle. La guerre dure : l’enfant maintenant est adulte et, malgré son handicap – lui aussi toujours innommé – est appelé à son tour. Il sera radio, dans la marine.
C’est un texte qui fait peur, tant on a peur d’y croire. Les voix des soldats, leurs plaisanteries, leur regard sur l’aveugle ; tout cela est si réel. Et pourtant, paradoxalement, la guerre omniprésente n’apparaît jamais. On apprend que tel ou tel, qu’on connaissait à peine, a trouvé la mort ; cependant l’ennemi reste invisible, théorique, presque inexistant. Du père du narrateur, on apprendra un jour qu’il a cessé d’écrire à sa femme, puis il n’en sera plus question. Jamais on ne dira : il est mort. Jamais le narrateur ne le saura. De même, alors que les alertes sont fréquentes, jamais on n’assiste à un bombardement, comme si cette guerre n’existait que dans l’imagination du narrateur. A un moment, tout de même, on croit qu’il va se passer quelque chose : le navire, ou plutôt l’épave laborieusement rafistolée où le narrateur a été enrôlé comme radio, est sur le point de partir. Il y a presque de la réjouissance chez le narrateur. A ce moment le texte s’arrête. Il y a un, dit le titre. La suite manque.
 
Avril 2006.
http://www.champ-vallon.com/images/imagesdetours/Bergounioux1.jpg
 
« J’écoutais. Comment on plante la tente, les différentes positions du tireur, le démontage du fusil pour le graisser, l’utilisation de la mitrailleuse en tir rasant, le lancer de grenade, les calibres, les grades, les insignes et les appellations, gravés dans ma tête, à force. Machin, il confond les sardines de la biffe avec la barrette des commandos, et l’autre, il avait mis les char­geurs supplémentaires à gauche dans le paque­tage, celui qui avait sa gourde accrochée par deux mousquetons, et ceux de la préparation spéciale, à se poser des colles sur le manuel de l’aspirant, le commandement des troupes en temps de guerre et les consignes de manœuvre au feu, et qui recommencent avec leur premier saut en parachute une après-midi d’hiver, la trouille que t’aurais quand tu te retrouves décroché avec rien en dessous parce qu’en plus il y avait de la brume, j’aurais aussi bien pu être à dix mètres du sol ou au-dessus d’un pylône, d’ailleurs la semaine précédente, un, sa sangle s’est coincée, changé en steak haché par les pales. Et la révision des examens de sous­-off, si tu passes aspirant, tu peux commander une section dans les trois ans, mon parrain l’a fait, c’est le mieux, t’as une autre appréciation du champ de bataille, pas te faire chier d’un petit chef que tu lui cires les pompes et pas piégé à faire du décodage pour la préfectorale dans un trou à l’arrière. Ouais, sûr qu’au début c’est dur. Tout le monde pourrait pas, quoi. »
 
Gabriel Bergounioux, Il y a un, Champ vallon, 2004.
 
 
La suite ne manque plus. La suite, c’est Il y a de, et depuis ce temps je n’ai jamais raté un livre de Gabriel Bergounioux – qui d’ailleurs en a fait paraître un tout récemment, sur un tout autre mode.

mercredi 21 mars 2012

Impressions Lucot 2006


Voici comment je vois les choses : depuis des années, un écrivain, Hubert Lucot, écrit un livre, le même. Mais un livre, c’est aussi un objet ; alors, à un moment, j’imagine qu’il s’arrête un instant, juste le temps d’expédier une liasse de feuilles à POL, qui en fait un livre, au sens où nous l’entendons habituellement. Un jour, l’un de ces « livres » me tombe sous la main, m’attire l’œil. Ça s’appelle Frasques, beau titre, j’ouvre, je jette un œil, tiens, ce sont des vers, bien centrés sur la page, je feuillette un peu, non, ce n’est pas un recueil de poème : très vite il y a un grand 1, et un titre de chapitre : « Morts, fraîcheur ». Fraîcheur, Frasques. Je sais déjà que le livre ne se limitera pas à une histoire de fredaines. Je lis :
 
« Villa fermée sur des herbes folles, grille rouillée écaillée. L’idée « Mort de Frank ».
Il vivait dans des locations souvent frustes… »
 
(Pendant que je lis la suite me poursuit cette phrase : « L’idée « Mort de Frank ». »)
Plus loin :
 
« La maison était basse, sa vétusté l’écrasait dans une impasse de poussière, l’escalier extérieur fait sonner la cloison. Forte femme, à l’odeur forte, la grand-mère de Frank repose dans sa mort proche en cet été 1950 : sable insistant déposé par l’obscurité, son lit-cage, dans un cadre piqueté de rouille et de mouches les moustaches de son mari mort il y a des décennies.
Quelqu’un dit : « c’est un peu comme si… » »
 
Si je me laisse aller je vais recopier le livre entier. En plus, ce n’est même pas celui dont j’ai promis la présentation.
Je n’ai jamais vu écrire ainsi. (Au fond de moi, un peu d’envie.) Déjà je sais que je ne m’arrêterai pas là dans ma lecture.
Je regarde la fameuse liste « du même auteur : », en fin d’ouvrage. Il y en a deux pages. Premières publications : 1969. C’est un monsieur qui a du métier. (Je comprends mieux, pour ses phrases. Quelque part, ça me rassure.) J’ai un peu honte de ne pas le connaître.
J’ai fini le livre, auquel, évidemment, je n’ai pas tout compris. Impression d’une visite en restant sur le seuil. De ne pas connaître tous les invités. (La réception était déjà commencée, quand je suis arrivé. Il faudrait que je reprenne tout depuis le début. Toute la lecture. Il commence où, le début ? Il faudra que je retourne voir la liste des titres, en fin d’ouvrage.) A-M, tout de même, femme de l’auteur, me devient vite familière. Et là, sur fond de mer, la silhouette crépusculaire de Jean-Edern  Hallier, que l’auteur appelle… comment l’appelle-t-il déjà ?
Je ne me souviens pas de tout ; j’ai lu ce livre en… « achevé d’imprimer : octobre 2001 » ; j’ai dû le lire début 2002. Puis j’ai lu Opérations, en 2003. Et Opérateur le néant, en 2005 ; que l’éditeur (ou l’auteur qui sait) a sous-titré « roman » ; c’est de l’humour, je me dis, et après tout, pourquoi pas ?
Si c’était moi, qui devais préciser le genre, qu’est-ce que je dirais ? Journal intime ? Mémoires ? L’intime et le public, la personne et le monde, le passé et l’actualité. Lucot, tobogannant, nous charrie de l’un à l’autre – on s’accroche, et c’est comme ça qu’on s’accroche, et qu’on lit l’opus suivant. Il me semble que, des trois textes évoqués, Opérations est le plus tourné vers le monde, théâtre où elles se jouent, et qu’Opérateur le néant serait le plus privé ; mais je n’en jurerais pas, je ne jurerais rien d’ailleurs de tout ce que j’ai pu dire, ce ne sont que mes impressions, en attendant la lecture du Centre de la France (2006).
 
Août 2006.
 
Et finalement, comme souvent et sans autre raison que le temps qui nous manque, j’ai enjambé le Centre de la France, et ne suis revenu sur ces terres qu’avec Allègements .
http://www.sitaudis.fr/Source/GF/operateur-le-neant-de-hubert-lucot.jpg

 

Commentaires

Lucot, juste un nom pour moi, mais tu redonnes envie d'aller voir, lire, intégrer.
Commentaire n°1 posté par Dominique Hasselmann le 21/03/2012 à 21h05
Même à moi ça me donne envie d'en lire un autre, tiens.
Réponse de PhA le 22/03/2012 à 17h50
J'aime bien : "je n'ai pas tout compris", "il faudrait que je reprenne tout depuis le début", "je ne me souviens pas de tout". C'est très encourageant. Et ça donne envie de se lancer dans l'aventure.
Commentaire n°2 posté par Anonyme le 22/03/2012 à 08h14
J'aime beaucoup ne pas tout comprendre, surtout à la première lecture, quand c'est le premier livre que je lis d'un auteur. Il me faut du dépaysement : en pays trop balisé, je m'ennuie.
Réponse de PhA le 22/03/2012 à 17h52

lundi 19 mars 2012

Les Saisons, de Maurice Pons.


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Un crâne de mouton
 
L’écrivain est un être simple et naïf qui arrive les mains nues avec l’espoir fou de laisser aux hommes le témoignage universel de sa souffrance, lesquels seraient dès lors en mesure de dépasser les leurs – espoir vain puisqu’il est aussi incapable de les comprendre qu’ils sont de le comprendre, appartenant qu’ils sont à des mondes étrangers ; tout au plus saura-t-il leur rendre plus vive la conscience de leur misère, et attirer sur lui leur rancœur.
Ce serait somme toute une façon – bien pauvre – de résumer les Saisons de Maurice Pons. Bien pauvre car à la lecture, ce livre merveilleux, étonnant à chaque page, est bien autre chose encore que cette expression de l’impossible écriture. Dans un paysage montagneux et rural s’en vient sous une pluie sans fin un voyageur solitaire et disgracié, au physique ovin, qui débarquant dans le village perdu d’une vallée encaissée s’y installe, et croit pouvoir y réaliser son rêve fou : devenir écrivain. Dès son arrivée, il se heurte à l’hostilité et à l’incompréhension des villageois, et ce heurt prend d’abord la forme prémonitoire d’un crâne de mouton qu’on lui lance d’un grenier, et contre lequel Siméon blesse son orteil dans un geste de rage impuissante. C’est le début d’une longue dégradation physique au royaume de Sa Majesté Pourriture, ce pays aux saisons interminables, où la pluie pendant des mois tombe nuit et jour, avant d’enfin céder la place au « gel bleu » qui fait tomber les choucas et durcir les globes oculaires, tandis que les habitants se chauffent en s’attachant au ventre quelque bestiole à sang chaud.
Le contraste entre l’idéalisme naïf et innocent de Siméon, sa vulnérabilité, et le caractère immonde de son nouvel entourage – la mesquinerie de la veuve Ham, l’impudeur de Clara Dogde, la gouaille trop mûre de la petite Louana, la méchanceté gratuite du douanier Esclados, la science sauvage et souriante du Croll, tout cela parmi les montagnes de fumier –, donne lieu à la lecture intermittente, trop rare peut-être, du journal ineffable de Siméon qui, tout confit de bonté vaine, donne de la vie du village une description délicieusement décalée. A chaque page le lecteur s’émerveille de l’imaginaire de l’auteur, qui enrichit la description du village et l’histoire de Siméon d’événements inouïs, souvent proches de l’insoutenable, heureusement contrebalancés par une sorte d’humour consécutif à l’étrangeté.
Quand je pense que je n’avais jamais entendu parler de ce livre (paru en 1965), ni de cet auteur, j’ai tendance à me dire que cette histoire d’un homme qui se veut écrivain sans vraiment pouvoir écrire, l’histoire de cet homme qui n’a aucune chance de se faire entendre un jour, c’est bien une histoire, sinon l’histoire, de la littérature.
 
Mars 2008.
 
Un extrait ici.
 
Avant l’ouverture de ces Hublots, un autre moi-même s’est vaguement essayé à la critique littéraire, sous le couvert d’un pseudonyme – bien conscient de n’être pas au mieux dans ce genre d’exercice. Certains articles néanmoins méritent peut-être quand même d’être lus, au moins pour faire connaître les textes concernés, pendant que je retourne à mes copies.


Commentaires

Un incontournable, ce livre, ce qui devrait t'encourager à lire tout Pons, car tout y est bon.
Commentaire n°1 posté par Pascale le 20/03/2012 à 19h09
Mais j'y compte bien !
Réponse de PhA le 20/03/2012 à 21h00
Je lis Les Saisons. Je suis effectivement émerveillée par l'imaginaire de l'auteur, sidérée par les personnages, émue par Siméon, songeuse devant toutes les questions posées. Ce livre me fait un peu l'effet d'un coup de poing. Je ne connaissais pas Maurice Pons.
Commentaire n°2 posté par Anonyme le 26/03/2012 à 18h27
C'est un livre vraiment très fort, très singulier, et bien trop peu connu en effet - malgré les années.
Réponse de PhA le 26/03/2012 à 20h32

dimanche 18 mars 2012

heureux celui qui peine à trouver un éditeur

Dans le prolongement de ce que je disais hier, quelques mots encore :
Avoir sous le bras son manuscrit et peiner à trouver son éditeur, c’est peut-être une chance.
C’est une chance qui m’a d’abord été refusée, remplacée par une autre : de voir mon texte accepté du premier coup par une grande maison. (Une chance qui ne m’a que médiocrement profité.)
Mais j’ai eu droit à une seconde chance : peiner à trouver un éditeur pour une deuxième livre. Plusieurs années, tant je m’y prenais mal. M’y prendre mal était un moyen de prolonger cette seconde chance. Cette chance, c’était d’avoir une raison de fouiller vraiment le paysage éditorial contemporain, de voir ce qui se publiait ailleurs, ce qui s’écrivait vraiment. De retrouver la possibilité de lire – car pendant environ huit ans la lecture de littérature m’était devenue impossible (une forme de dépression spécialisée, sans doute). Donc oui : heureux celui qui peine à trouver un éditeur – et qui pourtant ne connaît pas son bonheur.


Commentaires


Paradoxe intéressant. Je songe à Tristan Egolf, refusé par une "septantaine" - dirait-on ailleurs - d'éditeurs américains et dont Le Seigneur des Porcheries fut publié pour la première fois en français par Gallimard, sur intervention de Modiano qu'Egolf avait rencontré dans des circonstances totalement fortuites... Je pense également à John Kennedy Toole qui se suicide après avoir été refusé par une trentaine d'éditeurs. Sa "Conjuration des Imbéciles" ne verra le jour que grâce aux efforts d'une mère infatigable, comme le sont parfois les mères, face à un éditeur plus que lassé, qui se force à lire un peu plus avant et qui découvre que oui, là, il tient quelque chose. Ce quelque chose obtiendra le prix Pulitzer en 1981 (si tant est qu'un prix soit une référence).
J'ignore si Egolf (qui finira aussi par se suicider) et Toole ont pu saisir cette chance d'aller fouiller dans les catalogues des éditeurs. On est là dans un contexte américain, une fois de plus. Vous avez évoqué le cas de Faulkner et vous aviez probablement raison.
Commentaire n°2 posté par Anonyme le 19/03/2012 à 10h21

Oui, le contexte américain est sans doute différent - mais il n'y pas de raison de penser que les icebergs n'y aient pas aussi l'essentiel de leur masse immergé.
Réponse de PhA le 19/03/2012 à 12h22
Je me reconnais quasiment trait pour trait dans ce que tu dis. 
Commentaire n°3 posté par Dominique Boudou le 19/03/2012 à 11h53
Oui, nous devons être quelques uns.
Réponse de PhA le 19/03/2012 à 12h22
 

samedi 17 mars 2012

Au Salon du Livre il y a des éditeurs.


Au Salon du Livre, souvent, il y a des gens qui cherchent des éditeurs. Certains cherchent des éditeurs qui existent, d’autres des éditeurs qui n’existent pas. Les premiers les recherchent parce qu’ils connaissent leur catalogue, qu’ils apprécient leur travail, et qu’un salon c’est la chance d’avoir des conseils de lecture de première main. D’autres recherchent des éditeurs qui n’existent pas, dont ils ne connaissent pas le catalogue, dont l’idée ne leur vient pas à l'esprit qu’ils pourraient ouvrir un des livres présentés avant d’essayer de leur proposer leur manuscrit. Il y a là comme un malentendu : ils recherchent des éditeurs qui n’existent pas et ne rencontrent que des éditeurs qui existent. Des gens qui ne lisent pas et qui voudraient être lus. Des gens qui vivent une vie de rêve.


Commentaires

C'est malheureusement vrai. Et pour la poésie encore plus flagrant.
Commentaire n°1 posté par Dominique Boudou le 18/03/2012 à 08h54
La poésie nous dit aujourd'hui ce que sera la littérature demain.
Réponse de PhA le 18/03/2012 à 19h50
Rien de nouveau sous le soleil, et j'aime beaucoup ces coquelicots...
Commentaire n°2 posté par Pascale le 18/03/2012 à 12h10
C'est bien le problème (le rien, hein ; pas les coquelicots).
Réponse de PhA le 18/03/2012 à 19h52
PS : tu aurais dû venir hier soir chez Lydia, sa soirée littérairement "mortelle" était extra, elle t'aurait remonté le moral ! Des textes fabuleux, une salle pleine. La littérature, son partage, tout ce que j'aime.
Commentaire n°3 posté par Pascale le 18/03/2012 à 12h12
Il y a une prochaine soirée que je compte bien ne pas manquer.
Réponse de PhA le 18/03/2012 à 19h53
Lire si l'on veut écrire me paraît une évidence. J'irai plus loin : tous les livres sont utiles à celui qui veut écrire, au moins dans un premier temps. Histoire d'y voir plus clair, de faire un tri, de savoir soi-même ce que l'on cherche, de se trouver.
Naturellement, on peut passer par la critique littéraire. Je ne suis pas certaine que son apport ait la même profondeur. Vous écrivez dans une de vos réponses : "...parce que Faulkner, comme ça, brut de toute explication préalable, eh bien on trouverait que c'est trop difficile." Pour ma part, je n'ai pas eu d'explication préalable. C'est en lisant beaucoup et par comparaison que je suis tombée dans Faulkner. Certes, ma méthode prend beaucoup de temps et, comme vous dites, on ne peut pas tout lire.
Mais j'ai écouté aussi votre leçon : j'ai commandé "Une affaire de regard" (d'occasion, par Amazon, de mon trou de province). Justement, le "regard" m'intéresse tout particulièrement. Et j'ai tellement de lacunes à combler.
Commentaire n°4 posté par Anonyme le 18/03/2012 à 12h23
L'écriture suppose la lecture, mais aussi il y a ceci qui échappe trop souvent : un catalogue éditorial, quand le travail est fait honnêtement, c'est le reflet d'une personnalité, de goûts, de choix qui font le sens même de ce travail. Aimer le travail d'un éditeur, pour un candidat à la publication, c'est la première des conditions pour donner une chance à son texte (même si on n'est pas obligé d'être d'accord avec tous les choix).
Bien sûr, Faulkner peut être immédiatement lisible. Mais allez présenter l'équivalent aujourd'hui aux éditeurs les plus solides, les plus à même de prendre des risques - c'est-à-dire les plus gros, les plus riches -, il y a de fortes chances pour le texte soit catalogué comme "trop exigeant" ; surtout pour les collections principales.
Et merci pour votre regard ! (J'aurais bien des choses à dire encore, à propos de ce texte - catalogué comme le plus accessible que j'aie commis - et de ce que je viens d'écrire ci-dessus ; mais ce serait un peu long.)
Réponse de PhA le 18/03/2012 à 20h08
"Si tous les candidats à l'édition lisaient au moins 100 livres/an, l'édition serait sauvée de la faillite ! Car ça veut dire qu'ils écriraient moins puisque lire prend du temps, et ils deviendraient peut-être plus exigeants quant à leur propre production qui du coup sera moins prolifique." Le jour où j'ai lancé cette réflexion sur le ton de la plaisanterie, on m'a regardé d'un sale oeil, et pourtant...
Commentaire n°5 posté par Pascale le 20/03/2012 à 20h26
Allez, on va dire 50, et plus de sale oeil. (Je suis bien d'accord.)
Réponse de PhA le 20/03/2012 à 21h02
Ecrire est déjà assez long et difficile, alors s'il faut lire les livres des autres par dessus le marché... 
Commentaire n°6 posté par Depluloin le 27/03/2012 à 11h13
Ça c'est bien vrai, tiens.
(Alors, et ce retour ? ça se prépare ?)
Réponse de PhA le 27/03/2012 à 20h56
Dominique le retour (rire)! Très contente de te savoir vivant !
Commentaire n°7 posté par Pascale le 27/03/2012 à 20h51

vendredi 16 mars 2012

Lire élire...

... c'est à lire ici, et c'est signé Philippe Annocque, Claro, Nathalie Lacroix, Laure Limongi, Lionel-Edouard Martin, Vincent Monadé, Romain Verger et Marc Villemain.

Commentaires

... on le délivre, quoi.
Commentaire n°1 posté par Gilbert Pinna le 16/03/2012 à 11h38
Qu'on s'en délivre, plutôt !
Réponse de PhA le 16/03/2012 à 19h00
Monsieur le Comte sait aussi être de ce monde, quel plaisir ! J'applaudis, et que ceux des premiers rangs fassent tinter leurs bijoux.
Commentaire n°2 posté par r1 le 16/03/2012 à 19h18
Oui, mon permis de séjour sur Terre n'est pas encore expiré, alors j'en profite.
Réponse de PhA le 16/03/2012 à 19h27
(Pour résumer : on s'en délivre et, du coup, on le délivre)
Commentaire n°3 posté par Gilbert Pinna le 16/03/2012 à 19h31
Bravo pour ce texte : il est plus que temps que les écrivains et les "intellectuels germano-pratins", qui ont été vilipendés tout au long du quinquennat de NS, affichent leur engagement politique à la veille du changement.
Ce n'est pas la piètre comédie vue hier soir sur Canal + (NS en direct dans "Le Grand Journal") qui suffira à redorer le blason d'un chef de l'Etat qui ose dire - son humour le trahit - que "c'est Carla qui m'a appris à lire et à compter" et qui a sabré dans la culture comme il l'a fait dans les services publics.
NS a toujours cru d'ailleurs qu'au Salon de l'agriculture, la culture elle-même était représentée dans la deuxième partie du mot et que les livres présentaient cette forme de grosses bottes de paille.
Il n'avait simplement pas senti la poutre (penchant à l'extrême droite) qu'il avait dans l'oeil, mais plus pour très longtemps.
Commentaire n°4 posté par Dominique Hasselmann le 17/03/2012 à 07h38
Merci Dominique, et merci aux principaux rédacteurs (je ne suis que co-signataire - mais complètement partie prenante et bien content de signer).
Réponse de PhA le 18/03/2012 à 19h45
Il prétend lire. Comme je ne peux l'entendre parler sans hérissement du poil, je l'ai entendu ergoter sur "La confusion des sentiments" de Zweig avec la sincérité de celui qui a révisé ses notes sur le "pitch" de la nouvelle et n'est plus très sûr de sa mémoire. Dé-lire 
Commentaire n°5 posté par Zoë Lucider le 17/03/2012 à 16h18
Oui, c'est un comédien un peu inégal.
Réponse de PhA le 18/03/2012 à 19h48
Bigard prix Nobel, Doc Gynéco à l'académie avec Christian Clavier...
Commentaire n°6 posté par Dominique Boudou le 18/03/2012 à 08h57
"Il ne faut pas mépriser la culture populaire."
Réponse de PhA le 18/03/2012 à 19h52
 

mercredi 14 mars 2012

de la culture des marronniers de bon matin


8 heures 20 ou quelque chose comme ça, je m’apprête à quitter la Nationale 10 à la Grâce de Dieu, les usagers connaissent, et le radar juste après entre les platanes ; à la radio c’est les Matins de France Culture, deuxième partie, Brice Couturier accueille Russell Banks :
« Et moi la question que je me pose à la lecture du livre de Russell Banks c’est pourquoi, pourquoi les romanciers américains sont-ils capables de donner des descriptions aussi précises, aussi justes de la vie des vraies gens quand nous, ici, nous devons nous contenter des documentaires et des enquêtes pour avoir une manière… avoir une idée de la manière dont on vit chez nous. Bref, on demande des Russell Banks français d’urgence. »
Et moi la question que je me pose c’est pourquoi toujours ces mêmes marronniers dans notre paysage, comparer ce qui n’est pas contemporain (il m’a toujours semblé que le roman américain apparaissait à peu près à l’époque où disparaissait le roman français, au moins sous sa forme assumée), et cette confusion sous-jacente entre roman et littérature, sans parler du cliché des « vraies gens » digne d’un discours de campagne.
Il paraît que la littérature française n’a plus d’audience à l’étranger. Qui, au fait, est chargé de la faire connaître ?
Heureusement que Banks est là pour répondre par l’histoire littéraire américaine – eh bien oui, les littératures aussi ont des Histoires, différentes, on n’y échappe pas – et complète sa réponse par un échange qu’il a eu avec un romancier chinois ; mince, c’est justement au moment où ça devient intéressant que j’arrive sur le parking du collège ; il faut que j’y aille, là aussi il y a de vraies gens, pas plus hauts que trois pommes pour certains mais vraiment vrais ceux-là, qui m’attendent.




Commentaires

Il a raison, Brice Teinturier. En plus, les couleurs ne tiennent pas. Les descriptions de Balzac et de Zola ne correspondent plus à rien du tout. Ou alors, c'est les vrais gens d'aujourd'hui qui sont décolorés. Ou la critique minute façon pressing littéraire. Ou la langue française qui ne jure que par la haute couture.
Commentaire n°1 posté par David Marsac le 14/03/2012 à 16h22
Moi je penche pour la deuxième option : les vrais gens d'aujourd'hui sont décolorés. Vivement la deuxième chaîne !
Réponse de PhA le 14/03/2012 à 17h54
Je débarque sur ce blog et je découvre cet enthousiasme pour le roman américain. Oui, depuis Faulkner, même depuis Caldwell ou Steinbeck, on ne peut plus lire les romans français... Pourtant, je n'ai pas tout lu, il doit bien y en avoir tout de même... Pour ce qui est de la description, unpetit chef d'oeuvre : "Cartes Postales" d'Annie Proulx.
Mais j'étendrai le roman américain au roman anglosaxon. Avez-vous lu "L'Art du Roman" de Virginia Woolf. Elle ne résout aucun problème, ne donne aucune clé mais après l'avoir lue, on se sent drôlement mieux, plus libre. Cette suicidaire donne la pêche....
Bon, je n'ai lu que votre dernier post, je ne sais pas ce que vous dites ailleurs, en tout cas, le roman américain ou anglosaxon (avec H. James pour faire le lien) m'a comblée ces quinze dernières années. Mes plus récentes lectures : "Le dernier stade de la soif" (Exley), génial, Trollope (et oui, on retombe dans le XIXème et déjà, c'est à cent coudées au-dessus de Balzac) avec "Quelle époque!", très drôle, et "Un petit boulot", policier de Iain Levison avec un tueur pour narrateur mais, ce tueur-là, je l'épouse tout de suite.......
Commentaire n°2 posté par Anonyme le 14/03/2012 à 17h47
Je crains que vous ne fassiez un contresens sur mon billet, je ne crois pas un instant que la littérature américaine contemporaine (contre laquelle je n'ai rien, d'ailleurs) soit supérieure ou inférieure à la française, je dis tout simplement qu'elles ne sont pas comparables. Personnellement j'ai beaucoup de méfiance à l'égard du roman (certainement partagée par certains anglo-saxons qui en renouvellent la forme, puisque vous citiez Faulkner, James, Woolf) - ce qui ne m'empêche pas d'en écrire à l'occasion, en variant à chaque fois les précautions. Mais mes goûts me portent souvent - même si pas exclusivement - vers des formes de littérature qui ne s'inscrivent pas dans des genres préexistants, qui ne font pas école, qui créent à chaque fois leurs propres codes - et dont la littérature française actuelle donne quelques beaux exemples (Volodine, Savitzkaya, Chevillard, Minard et d'autres visibles en bas à gauche de votre écran). Il est dommage que certains journalistes les ignorent - même si, certes, celui que j'ai visé ci-dessus n'est pas un spécialiste.
Réponse de PhA le 14/03/2012 à 18h14
Ah mais si, nous z’aussi on a des « vraies gensses » et même des vrais cul-terreux et même des vraies meumeuh, dans notre bonne littérature françoise ! La preuve, on a François Millet qui n’a rien à envier à son homonyme, le peintre des glaneuses. Pas une page qui ne sente le crottin, le lait caillé, le patois du terroir et la culotte de la mère-grand ! Des vrayes gensses, mais alors vrayes de vrayes ! Des brutaux, des chafouins, des taiseux, des mêmes pas pasteurisés. A ce stade, c’est même plus des romans, c’est la foire agricole ! Cependant, ce qui différencie plus sûrement un Millet de ses homologues américains, tient dans ce style prodigieux, cette orfèvrerie de la langue, cette fluidité de la syntaxe, cet amour du verbe dont les européens sont les seuls héritiers et dont seuls ils possèdent la culture et le savoir-faire.
Qu’on aime ou pas Millet-et Dieu sait que je ne peux pas le blairer, tellement il me déprime -on ne peut rester insensible à la beauté du style, écoutez ça un peu :
 
« Après moi la langue ne sera plus tout à fait la même. Elle entrera dans une nuit remuante. Elle se confondra avec le bruit d’une terre désormais sans légendes. Les langues s’oublient plus vite que les morts. Elles tombent, comme le jour, le vent, ou le silence sur le monde où je suis né et qui était peuplé de gens rudes, peu loquaces, au visage tourné vers le couchant, et qui auraient souri de me voir, moi, le dernier des Bugeaud, seul de ma race aujourd’hui à écrire le français à peu près comme ils ont rêvé de le parler ou, pour quelques-uns, l’ont parlé, quand ils ne s’exprimaient pas en patois, dans ce parler limousin où s’entendait encore, entre les souffles des animaux et ceux des grands bois, tous les temps du subjonctif, tandis que le français y renonçait et qu’ils parlaient, eux, avec ce respect de la syntaxe française qui était la véritable armature de l’homme, pour les Bugeaud comme pour les autres Siomois, y compris ceux qui parlaient mal mais qui considéraient que s’exprimer correctement était ici-bas, le vrai, le seul vêtement de gloire »
 
Cet incipit sublime, dont certaines phrases quasi cicéroniennes, eu égard à leur déploiement, nous rappelle à quel point la littérature classique est notre berceau et comme nous sommes pétris d’humanités, n’a rien à envier à la littérature américaine qui, quoi qu’en en dise, s’est arrêtée avec Hubert Selby Jr. Et, au-delà du fait qu’elle fasse état de « vrais gens », elle possède surtout un vrai style, une vraie poésie, en un mot : du talent ! J’aurais pu citer encore Alain Roehr, voire Pascal Mercier qui, bien que suisse, n’en écrit pas moins en français, mais puisqu’il fallait rebondir sur des « vrayes gensses », sans tenir compte des vraies plumes…et, allez tiens, d'une vraie pensée ! Au moins c'est dit !
Commentaire n°3 posté par Aukazou le 14/03/2012 à 18h59
Millet a une plume, il faut le lui reconnaître, qui lui vaudrait bien de s'appeler François s'il n'était déjà Richard.
Je crois bien que Pascal Mercier écrit en allemand - mais qu'à cela ne tienne : il me semble que la littérature contemporaine de langue allemande est elle aussi assez ignorée de nos médias, précisément au moment où elle en tient de grands, comme Reinhard Jirgl, par exemple.
Réponse de PhA le 14/03/2012 à 19h34
rectif : "nous rappelleNT"
Commentaire n°4 posté par Aukazou le 14/03/2012 à 19h02
Autre rectif, décidément ! Ce n'est pas François (lapsus calami car je pensais à la langue française) mais Richard Millet.
Commentaire n°5 posté par Aukazou le 14/03/2012 à 19h28
J'avais bien interprété l'origine du lapsus : François lui va bien.
Réponse de PhA le 14/03/2012 à 19h44
Vous avez raison, Mercier écrit en allemand, je viens de vérifier. J'ignore qui le traduit mais c'est une belle association.
Commentaire n°6 posté par Aukazou le 14/03/2012 à 19h51
Il est trompeur avec son pseudonyme étrange.
Réponse de PhA le 14/03/2012 à 19h55
Mea culpa : j'ai écrit trop vite. Avant même votre réponse, après avoir fouillé dans votre biographie (celle du blog), j'ai pris conscience de mon erreur.
Pour ce qui est du "roman", encore faudrait-il redéfinir le mot, vaste entreprise. Les auteurs que je lis produisent des oeuvres étiquetées "romans", James, Woolf, Faulkner, McCarthy, Hubert Selby Jr. (que cite un de vos commentateurs), etc... sont des écrivains en recherche de nouvelles formes. J'ai la même méfiance que vous envers ce qu'il est convenu d'appeler un roman disons... classique.
Je ne connais pas les auteurs français que vous citez. J'irai voir. Quant aux journalistes qui les ignorent, je les ignore moi aussi. Très rarement je me fie à un discours critique. C'est un auteur qui me mène à un autre. Après avoir mis le pied dans la littérature anglosaxonne, je n'en suis pratiquement plus sortie. Forcément, ce système entraîne des ignorances.
J'exagère un peu, vous vous en doutez. J'ai quelques passions dans la littérature française mais je suis très infidèle depuis quinze ans. Et vous avez raison : on ne peut pas comparer. Je me demande si mon addiction actuelle ne serait pas liée au fait que j'ai longtemps vécu à l'étranger et que je me sens profondément de nulle part.....
Commentaire n°7 posté par Anonyme le 14/03/2012 à 23h17
Mais on ne peut pas tout lire, même quand c'est notre métier - il faut s'en souvenir avant de porter des jugements généraux et hâtifs comme le marronnier ci-dessus (Couturier ne fait que ressasser un refrain connu). Il faut conserver le soupçon que ce qu'on ne connaît pas peut exister quand même.
Je me demande souvent ce qu'il adviendrait de l'oeuvre de Faulkner si elle était l'oeuvre d'un auteur français écrivant aujourd'hui. Ce serait publié chez Quidam, Verdier, Champ vallon ou un autre risque-tout ; ça ferait sans doute l'objet de quelques beaux articles ici et là (car il y a encore quelques critiques qui font bien leur travail) - mais pas tant que ça ; et on serait content de dépasser les mille exemplaires. Je caricature sans doute. Peut-être. Pas sûr. Tout simplement parce que Faulkner, comme ça, brut de toute explication préalable, eh bien on trouverait que c'est trop difficile. Pardon : "exigeant", c'est comme ça qu'on dit.
Réponse de PhA le 15/03/2012 à 16h18
Pour couronner le tout : un lapsus... "les auteurs que je lis, qui produisent...."
Commentaire n°8 posté par Anonyme le 15/03/2012 à 09h13
à Aukazou
En dépit de la magnificence de votre citation, je m'insurge : nous serions, nous, Européens, les seuls héritiers de l'amour du verbe? Je m'insurge, oui, contre cet européanocentrisme, si répandu.... Voyagez, regardez, écoutez : l'inventivité langagière, la poésie, le "vrai style", le talent sont de toutes les cultures.
Il existe, entre autre, à Madagascar, un art de la parole qui est une des bases de la culture malgache. C'est le "kabary" qui consiste en de véritables joutes oratoires qui peuvent durer des journées entières et qu'on retrouve partout, lors des retournements des morts traditionnels, jusque dans le théâtre populaire.... Et pour avoir tenté d'apprendre la langue malgache, je peux vous dire qu'on n'y appelle jamais un chat, un chat, qu'on passe toujours par des métaphores, que la construction grammaticale des phrases suppose une autre vision de la société et que c'est très compliqué pour les Cartésiens que nous sommes...
Il me semble que, pour pouvoir juger, il nous faudrait connaître bien d'autres langues que la nôtre.....
Commentaire n°9 posté par Anonyme le 15/03/2012 à 11h36
Ecoutez, je n'ai pas la patience, ni la courtoisie de vos interlocuteurs habituels et vous n'avez pas le niveau de culture requis pour faire partie des miens. Que vous ayez une envie pathologique de vous regarder écrire, c'est votre problème mais ne venez plus m'apostropher.
Commentaire n°10 posté par Aukazou le 15/03/2012 à 11h49
J'ai l'impression que le grammairien voit la coquille à la place de l'oeuf.
Commentaire n°11 posté par David Marsac le 15/03/2012 à 12h16
A table servons-lui la couille du boeuf.
Réponse de PhA le 15/03/2012 à 17h09
A l'Ânonyme !
Désolée (quoique...) j'aurais dû fumer une clope avant de vous répondre mais le chant me l'interdit.
Très lapidairement, parce que l'absence de nicotine me rend expéditive :
a)- Nous parlions de littérature américaine. Je n'entendais donc pas faire le tour du globe avec vous !
b)- L'européanocentrisme n'a rien à voir avec ma conception de l'écriture. Il ne me semble pas qu'un débat d'idées relatif à l'ethnocentrisme ait été ouvert sur cette note. J'en juge que vous vous dispersez beaucoup et que votre souci n'est pas tant de réfléchir sur une question donnée que de rebondir sur les quelques mots qui pourront éventuellement alimenter votre logorrhée.
c)- Que savez-vous des langues que je pourrais parler et des pays dont la culture m'a nourrie ? Je n'aurais selon vous ni voyagé, ni expérimenté l'immersion dans d'autres langues que celle de Vaugelas. Parmi le nombre considérable d'inepties que vous avez pu proférer, je me demande si ça n'est pas la plus énorme... Pour info : mon père est iranien, ma mère flamande, mon arrière grand-mère maternelle d'ascendance maranne, mon mari turc et j'ai vécu en Grèce. Combien de langues croyez-vous que je parle ?
d)- Je ne vous ferai pas l'injure de revenir sur votre méconnaissance de Selby que vous vous êtes crue obligée de placer dans votre discours, histoire de me faire croire que vous auriez pu le lire. Ne vous fiez pas à la notice Wikipedia dans laquelle vous êtes allée mettre votre nez ! Selby n'expérimente aucune forme d'écriture qui n'ait déjà été élaborée par d'autres avant lui. Il ne rompt pas non plus avec la linéarité du récit, même s'il introduit, in Le Démon, une conception du temps augustinienne qui brise l'horloge sociale. C'est un romancier aussi intéressant, aussi créatif, que peut l'être le Céline du Voyage, mais rien d'absolument novateur dans son écriture ne le rattache à la littérature expérimentale.
e)- J'aurais bien aimé savoir en quoi des gens comme Volodine, par exemple, se sentent affranchis du genre romanesque, étant donné que le roman est un genre bâtard, polymorphe et relativement extensible. Et dans la foulée, j'aurais aimé savoir si des gens comme Volodine ou Chevillard (que je n'ai pas encore lus, je le précise...moi ! ;-)) considèrent que Queneau serait ou non un romancier, si le Cortazar de Marelle s'inscrit dans le genre du roman et si le Lee Siegel de L'amour dans une langue morte, voire le Danielewski de La Maison des feuilles et leur écriture expérimentale se rattachent ou non au roman ?
J'aurais aimé savoir encore si, en dehors des formes de l'Essai, de la poésie, du théâtre, de la Nouvelle, de la biographie, de l'autobiographie et du Roman, il existait une nouvel art d'écrire qui ne se rattache à aucune de ces catégories ?
Seulement, j'irai poser mes questions ailleurs parce que j'ai horreur qu'on me court sur le haricot quand ça ne s'impose pas ! Merci madame Ânonyme, j'suis pas prête de repasser dans le coin !
Commentaire n°12 posté par Aukazou le 15/03/2012 à 13h37
Ps : Et tenez, toujours dans l'idée que vous n'écoutez pas la parole de l'autre ! Si j'ai cité Millet et choisi un extrait de Ma vie parmi les ombres, ce n'est pas tant pour la richesse du style que pour invalider l'idée selon laquelle nous ne saurions, en France, écrire sur les "vrais gens". Le roman, à caractère rural, de Millet, nous démontre précisément le contraire !
Commentaire n°13 posté par Aukazou le 15/03/2012 à 14h34
à Aukazou,
Merci pour l'accent circonflexe...
Et je n'aurais pas lu Selby, tiens donc....
Et il vaudrait mieux écrire : je n'aime pas qu'on me courre sur...
Quant à la littérature américaine, elle est multiple, produit d'un melting pot de Turcs, d'Iraniens, de Grecs... alors...
Calmez-vous, allez fumer une clope. En ce qui me concerne, je préfère en rire. Et basta.
Commentaire n°14 posté par Anonyme le 15/03/2012 à 18h17
Philippe, j'ai exactement le même moment : voiture, France Culture et Russel Banks commencé au petit déjeuner, LA question de Brice Couturier et le malaise qui m'a suivie la matinée
Au moment de la réponse, au moment de l'écrivain chinois, eh bien j'étais déjà garée depuis un moment et ça pouvait plus attendre, ça sonnait, et les vraies petites gens de 3ème m'attendaient....
Commentaire n°15 posté par marie cosnay le 18/03/2012 à 19h14
Serions-nous nous aussi de vraies gens avec des vies parallèles ? (En traversant la cour j'avais déjà décidé d'en faire mon billet hygiénique du soir - du coup : pas de malaise !)
Réponse de PhA le 18/03/2012 à 21h01

dimanche 11 mars 2012

en échange, il faut raconter


L’ancien soldat, qu’est-ce qu’il fait là collé à poil poisseux de sueur ce soir d’été dans le cabanon d’Emmy longtemps après qu’il a fait ce pour quoi il venait, les corps, celui d’Emmy et le sien, sont détachés, le sien collé gras au drap neuf qu’il a porté, une règle fixée par Emmy : les hommes viennent avec le linge, l’ancien soldat qu’est-ce qu’il fait là, longtemps après qu’il aurait dû changer d’humeur, se mettre à craindre les maladies et mépriser la fille – non il dégueule le petit rire inattendu, tout aigu, maigrelet, un rire sans relation avec sa corpulence.
 
Son ventre (alors qu’il est allongé sur le dos dans l’abandon) tombe de chaque côté, à droite des amas de graisse et de l’autre côté, même chose. Il dégueule son petit jeu, l’ancien soldat, et soir après soir c’est ainsi, lui et les autres se donnent le mot, la fille vous laisse faire ce que vous voulez en échange de rien mais il faut raconter, tout ce passé on dit entre nous tout ce passé en ricanant, elle est folle pas mauvaise vicieuse, on revient on n’a pas peur d’elle qui a pourtant ce regard rentré ou c’est autre chose : un œil qui ne se concentre pas comme l’autre, où s’en va l’œil qui s’en va, quand ils parlent, les hommes, elle ne les touche pas sauf en haut du crâne, doucement frottant, elle sait quand il faut appuyer frotter plus fort, ils racontent et quand ils la quittent benêts ne pensent pas la folle, pas encore. Quelque chose en eux connaît la honte. Une honte qu’ils vont inverser en un tour de passe-passe. Pas de petit jeu, pas de petit rire quand ils marchent dans l’aube qui se lève, rideau ouvert, se lève, se lève, ils répètent se lève, je me lève et je vais vers quoi d’où je reviendrai pour la gamine. Ils ont honte mais une honte tendre. Ils ont raconté une histoire à une enfant : jeté ce petit pont entre eux d’autrefois et la gamine d’aujourd’hui. Ils étaient décidément aux côtés de la gamine et d’aujourd’hui – avec les kilos et les pauvretés qu’ont fini par donner la vie, tu calcules, le rêve et la famille, ça a pris cette odeur dégueulasse que tu compares à celle des fosses et de Satory –, ils étaient aux côtés de la gamine et ils étaient aujourd’hui, ils ont jeté le petit pont pour donner à l’enfant nue du bord du canal ce qu’elle a demandé, tout ce passé, ils ont souffert d’un défaut inévitable d’authenticité, ils ne pouvaient rien de mieux ne sachant rien de mieux. Ils songent dans les herbes du retour, les bottes dans les hautes herbes qu’au moins ils ont cherché à ne pas mentir. C’est comme ça et on a obéi.
 
Marie Cosnay, A notre humanité, Quidam, 2012, p. 57-58.
 
Emmy vend son corps contre le récit à vingt ans de distance de ceux qui ont réprimé la Commune. Au printemps 2011 Marie Cosnay écrit un livre sur une actualité de 140 ans. Déchirant.
Marie Cosnay, c’est aussi Entre chagrin et néant, Noces de Mantoue, André des ombres, Les Temps filiaux et bien d’autres avant l’ouverture de ces Hublots.
Sur A notre humanité, qui vient de paraître, on peut déjà lire ce bel article de Bénédicte Heim.


Commentaires

merci Philippe merci mille fois
raconter, oui
Commentaire n°1 posté par marie cosnay le 15/03/2012 à 15h53
Tous les mercis sont pour Marie. (Quel texte ! J'en suis encore tout secoué.)
Réponse de PhA le 15/03/2012 à 17h31

samedi 10 mars 2012

un départ


Son identité variable m’a toujours retenu – Giraud, Gir, Mœbius bien sûr mais même et encore à l’intérieur même de Mœbius (identité graphique variable). Et cette façon de laisser la fiction vivre sa propre aventure (je pense notamment au Monde d’Edena)

ou ce plaisir de prendre les mots au pied de la lettre.

On se sent un peu perdu. Comme un quidam.
http://www.quidamediteur.com/
 

vendredi 9 mars 2012

morale anatomique

Il n’y a pas de mal à ce que les gens de courte vue cherchent à avoir le bras long.


Commentaires

Ceux qui voient mieux de loin aussi.
Commentaire n°1 posté par Lza le 09/03/2012 à 14h52
Il y en a ?
Réponse de PhA le 09/03/2012 à 15h27
Les presbytes, ou les hypermétropes.
Commentaire n°2 posté par Lza le 10/03/2012 à 09h01
Quelles sont ces sectes étranges ? (Je suis myope et astigmate.)
Réponse de PhA le 13/03/2012 à 19h14
les hypermétropes ont-ils le droit de garder de longues jambes?
Commentaire n°3 posté par aléna le 11/03/2012 à 10h03
La prochaine fois, nous étudierons donc la vision des flamants roses.
Réponse de PhA le 13/03/2012 à 19h16
je note tout de même que vous avez raison : c'est fou ce que c'est proportionnel...
Commentaire n°4 posté par aléna le 11/03/2012 à 10h04
Ce doit être la nature qui parle.
Réponse de PhA le 13/03/2012 à 19h17
 

jeudi 8 mars 2012

journée de la femme

Si le roman continue comme ça, la littérature n’a qu’à demander le divorce.


Commentaires

Ha! ha! Bravo, Philippe! (Mais quel talent! quel talent!)
Commentaire n°1 posté par Depluloin le 08/03/2012 à 14h20
Arrêtez, vous allez me faire rougir comme un personnage de roman.
Réponse de PhA le 09/03/2012 à 15h22
Pas pour me vanter, mais je sentais venir la séparation.
Commentaire n°2 posté par L'employée aux écritures le 08/03/2012 à 15h20
C'est vrai qu'on sentait depuis longtemps que ça ne collait plus tellement entre eux.
Réponse de PhA le 09/03/2012 à 15h23
Blog(fermaton.over-blog.com)No-26, LA FEMME--L'AVENIR DE L'HOMME?
Commentaire n°3 posté par (Clovis Simard,phD) le 09/03/2012 à 01h09
Vous pouvez répéter la question ?
Réponse de PhA le 09/03/2012 à 15h23
Blog(fermaton.over-blog.com)No-26, LA FEMME--L'AVENIR DE L'HOMME?
Commentaire n°4 posté par (Clovis Simard,phD) le 09/03/2012 à 01h09
D'accord. (Mais je n'ai toujours pas compris).
Réponse de PhA le 09/03/2012 à 15h25
:))
Commentaire n°5 posté par aléna le 09/03/2012 à 12h03
Parce que les couples qui se déchirent, ça vous fait rire ?
Réponse de PhA le 09/03/2012 à 15h26
Un couple sur deux se déchire, d'après les statistiques, et après l'intervention élégante et pleine de civilité de Clovis, quelque chose me dit que la guerre pour le vase de Soissons aura lieu :-).
Commentaire n°6 posté par Pascale le 10/03/2012 à 08h51
Il paraît que maintenant on en fait des pré-découpés, pour éviter les déchirures trop vives.
Réponse de PhA le 13/03/2012 à 19h11