dimanche 6 avril 2014

bien lu


Etre bien lu, rien ne saurait procurer un plus grand plaisir ; en effet le lu à mes yeux surpasse l’élu : je renonce à la première présidence des Etats-Unis d’Europe que j’ai convoitée, je l’avoue non sans honte, durant mes années d’école maternelle – on me pardonnera bien ces modestes ambitions à l’échelle de la petite personne que j’étais. Aujourd’hui en effet je suis lu, et si quelque mauvaise langue ose me faire remarquer que c’est peut-être encore assez peu, j’ai de quoi lui montrer que la qualité de mes lecteurs est inversement proportionnelle à leur quantité ; lisez donc ces articles qui ont réjoui mon week-end : celui-ci de Jacques Josse sur Remue.net, celui-là de Romain Verger sur l’Anagnoste , et cet autre dont j’ignore mais salue l’auteur sur Booksface. Tout cela bien sûr à propos de Rien (qu’une affaire de regard), tandis que Dans mon oreille de son côté a aussi les siens, j’en ai rencontré quelques dizaines avant-hier à l’école Marcel Pagnol de Taverny, de tout petits lecteurs qui parfois savaient mieux que moi ce qu’il y a dans le livre et avec lesquels bien sûr j’ai joué toute la journée aux avions – merci à leurs maître et maîtresses, on recommence quand vous voulez.
Etre bien lu, c’est aussi parfois du direct, et même carrément du spectacle. Hier à la Maison de la Poésie le comédien Christophe Brault lisait Eric Chevillard et c’était épatant. La puissance comique de textes essentiellement littéraires portée par l’immédiat de l’oralité, un grand moment. On attendait bien sûr le désordre AZERTY et c’est par là que Christophe Brault a commencé – à la lettre C évidemment –, mais c’est tout un panorama de l’œuvre de Chevillard auquel nous avons eu droit : j’y ai reconnu aussi Péloponnèse, Dino Egger, Sans l’orang-outan, Oreille rouge, Iguanes et moines, Scalps, j’en oublie peut-être, mais oui : évidemment l’Autofictif (y compris du tout frais – non mais franchement appeler sa fille « Hop », hein, je vous demande). Mais mais mais je l’avoue je le reconnais non sans honte moi qui promenais partout ma prétention à connaître mon Chevillard sur le bout des doigts je n’ai pas reconnu un passage. Or on me souffle (j’appelle « on » une source a priori digne de confiance) que ledit passage non seulement n’est pas apocryphe (vous n’êtes pas sans savoir qu’une partie non négligeable de l’œuvre d’Eric Chevillard est en fait de la main de Thomas Pilaster) mais qu’on peut le lire aux pages 192 à 195 des Absences du Capitaine Cook. C’est peut-être un détail pour vous mais pour moi ça veut dire beaucoup. Ça veut dire que je l’ai lu en effet, ou plutôt qu’un autre moi-même forcément, tout juste renaissant à la lecture, l’a lu au printemps de l’an 2001, c’était son premier Chevillard et pas seulement – et a bien envie de s’y remettre. En effet, cette absence inhabituelle dans ma lecture ne peut avoir qu’une seule signification : je suis le Capitaine Cook.
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