samedi 3 septembre 2016

Beckett écrit (3)

Suite de mes glaneries beckettiennes,

« Un vieux rentre affolé, sa femme vient de tomber, fracture du col du fémur. "Elle ne tenait déjà pas debout" dit-il, "et maintenant..." Il cherchait une voiture pour la transporter, pour ne pas avoir à payer l'ambulance. On sentait qu'il aurait voulu l'abattre d'un coup de fusil. »
(C'est ce qu'il voit près de chez lui, en Seine-et-Marne.)


« Je suis très content que vous ayez envie d'arriver rapidement à l'Innommable. Comme je vous l'ai dit, c'est à ce dernier travail que je tiens le plus, quoiqu'il m'ait mis dans de sales draps. J'essaie de m'en sortir. »
(Moi aussi, c'est à ce dernier travail que je tiens le plus, quoiqu'il m'ait mis dans de sales draps. En plus ce n'est même pas moi qui l'ai écrit.)


« Laissez-moi vous dire encore combien je suis touché par l'intérêt que vous portez à mon travail et par le mal que vous vous donnez pour le défendre. »
(Bien sûr il écrit à Lindon, son éditeur. J'en ai autant pour le mien.)


« Je pense beaucoup à ses dernières peintures, miracles d'impuissance forcenée, ruisselantes de beauté et de splendeurs comme un naufrage de phosphorescences, on est littéraire décidément pour la vie, avec d'énormes voies par où tout fuit et tout rentre, et le calme écrasé des très grands fonds. »
(C'est à propos de Bram Van Velde, que j'ai découvert grâce à lui.)


« Vivement L'Innommable, c'est tout ce qui m'intéresse un peu encore. »

« Je me suis laissé dire qu'un journaliste du Figaro Littéraire, chargé d'enquêter sur les écrivains de Seine-et-Marne, avait découvert mon adresse malgré toutes nos précautions et, sa conscience professionnelle l'emportant sur toute considération de sécurité personnelle, menace de me rendre visite. Suivez donc attentivement les faits divers dans les semaines qui viennent, il y aura peut-être deux emmerdeurs en moins dans l’Île de France. »

« Mon cher Maurice Nadeau
J'ai lu avec émotion votre article sur L'Innommable dans Les Lettres Nouvelles. Dans un moment où mon travail ne valait plus rien. A vous lire l'envie renaît d'essayer encore. Elle n'ira peut-être pas loin. Mais comprenez ce que cela signifie pour moi et la mesure de ce que vous me donnez. Le il a été devient il sera, avec moi jusqu'à la fin. Je ne peux même plus vous remercier. Je peux seulement vous envoyer mon affectueuse amitié.

Samuel Beckett »

2 commentaires:

  1. C'est également grâce à la lecture de Samuel Beckett que j'ai découvert la peinture de Bram Van Velde et qu'illico j'ai consacré à l'un, à l'autre, et réciproquement mon mémoire de maîtrise d'arts plastiques et de lettres modernes. C'était il y a longtemps... Et tout ça pour finir professeur des écoles...

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    1. Bonne occasion de réconcilier l'école et les arts, et notamment la littérature ; vaste chantier ! (Là c'est le professeur de collège qui parle.)

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