mardi 26 avril 2011

inspection sous les couvertures

Très honnêtement, même si la plupart du temps, ouf, je n’y pense guère, je dois bien reconnaître que le « succès » rencontré par certains livres me gratte un peu. Comme je n’aime pas me faire du mal, je ne les lis pas, ou guère, et suis bien mal placé pour les critiquer ; je me contente d’aller renifler sous la couverture. Citerais-je des noms ? Allons, soyons lâche : ni Marc Lévy ni Guillaume Musso ni Bernard Werber n’en sont coupables. Je suis sérieux : ces gars-là ne me donnent pas d’urticaire. C’est aussi que les couvertures, précisément, sous lesquelles leurs œuvres paraissent annoncent clairement et honnêtement la couleur. Il en faut, de la couleur, pour être visible sur les rayons de Carrefour. (Oui, tout de même, on les trouve aussi en librairie, où leurs piles prennent de la place ; ça c’est moins sympa. Mais au moins on est prévenu, on ne s’attarde pas.)
Non, plus sérieusement, ce qui me démange, c’est plutôt le syndrome Canada dry : quand ça a la couleur, les mots, la couverture de la littérature – mais rien de plus. La couverture, surtout. J’aime bien que les éditeurs aient des collections – car c’est bien ce qu’on espère trouver sous une couverture facilement identifiée. La collection, ça devrait être la première indication pour le lecteur. Or soulevez-en certaines, hélas, c’est le règne de la confusion. Là-dessous, on trouve de tout – et aussi n’importe quoi – notamment sous des jaquettes qui, par leur sobriété, semblent pourtant vouloir nous dire : « c’est ici que s’écrit la littérature d’aujourd’hui ». Mais le lecteur averti qui bien sûr en vaut deux ne s’y laisse pas prendre deux fois. Cette pratique, qui consiste, comme on dit élégamment, à vendre des vessies pour des lanternes, si elle permet peut-être, j’imagine, de réussir quelques coups, est évidemment dommageables aux livres publiés dans ces mêmes collections et qui valent quelque chose, oui il y en a, et au-delà, puisqu’il s’agit souvent de maisons puissantes, à l’ensemble de la littérature contemporaine. C’est sans doute à la fois l’une des causes et l’un des symptômes de cette crise de la représentation que j’évoquais il y a quelques temps.



Commentaires

Grasset et Stock, donc...
Commentaire n°1 posté par Didier da le 26/04/2011 à 08h40
Didier pas da(ltonien).
(Bon, on pourrait aussi en citer d'autres et repeindre l'arc-en-ciel...)
Réponse de PhA le 26/04/2011 à 13h46
décidément, vous êtes en télépathie avec E. Chevillard? encore?
Commencez donc par vous réconcilier avec le  Jardin  :))
Commentaire n°2 posté par Aléna le 26/04/2011 à 09h48
Le jardin ? Mais j'adore mon jardin : il prend presque autant de place sur ce blog que celui d'Eric Chevillard sur le sien !
Réponse de PhA le 26/04/2011 à 13h50
Imaginons des livres sans couverture - surtout en période de sécheresse - et ça éviterait en plus les quatrièmes de, ces sortes de bandes-annonces dans le style films, on commence donc directement à lire, cela a été déjà fait un temps pour une collection, mais évidemment la première page ne serait plus protégée, alors on peut mettre dix fois la même première page, donc on commence bien par la lecture uniquement du livre (ou son avatar) et l'auteur et l'éditeur peuvent être mentionnés plus loin ou ailleurs, et il n'est plus nécessaire de rajouter une photo pour attirer le chaland qui passe, enfin, je dis ça comme ça.
Commentaire n°3 posté par Dominique Hasselmann le 26/04/2011 à 12h01
J'ai fait aussi ce genre de rêves...
Plus simplement, je me contente d'espérer qu'on reviendra à un meilleur respect des lignes des collections. Ces bouquins qui me grattent me gratteraient moins sous une couverture moins littéraire - laquelle n'est vraiment plus qu'une couverture.
Réponse de PhA le 26/04/2011 à 13h56
Bien vérifier l'étanchéité de l'alèse.
Commentaire n°4 posté par Gilbert Pinna le 26/04/2011 à 12h37
(Moi je ne dis rien : j'ai déjà écrit liquide...)
Réponse de PhA le 26/04/2011 à 13h57
Vous alors, vous n'avez que des hublots, mais on peut dire que vous y voyez clair ! (qu'est-ce que ce serait si vous aviez des baies vitrées ?
Commentaire n°5 posté par L'employée aux écritures le 26/04/2011 à 19h36
J'ai de bons laveurs de carreaux.
(Si j'avais des baies vitrées...
Réponse de PhA le 26/04/2011 à 20h28
J'en ai même oublié de fermer ma parenthèse...
Commentaire n°6 posté par L'employée aux écritures le 26/04/2011 à 19h37
... je les laisserais ouvertes comme votre parenthèse.)
Ce qui est perdu de vue, aussi, dans de telles pratiques, c'est que la littérature est une sorte d'organisme vivant. Qu'on le veuille ou non et malgré les différences, on est tous un peu siamois dans cette affaire, et rien de ce qui se fait n'est sans conséquences pour les autres.
Réponse de PhA le 26/04/2011 à 20h33
Je découvre seulement ce soir (je manque d'assiduité ces dernières semaines) votre joute verbale magnifique en cliquant sur crise de la représentation.
On est là entre gens de qualité! Le calme des protagonistes me laisse admirative. C'est passionnant. En tant que lectrice je viens ici rajouter mon grain de sel; là-bas, c'est trop calé pour moi:) Eh bien, c'est jouissif de vous lire comme ça Philippe. Vous nous offrez-là un beau cadeau : l'écrivain qui répond du tac au tac sur le sujet qui nous passionne tous ici : la littérature. Votre interlocuteur a de la belle répartie. Je vais garder ce billet sous le coude, il mérite avec les commentaires une relecture. Tout de go (ça se dit encore cette expression?(0_0)) je crois que je suis à 50/50 en accord et désaccord concernant les auteurs que vous chérissez et ceux que vous... aimez moins (restons soft).
Et là j'applaudis à quatre mains:) : 
" Pour ma part j'ai tendance à penser qu'il n'est pas forcément juste d'aller dans le goût du public, mais qu'il vaut mieux amener le public à aimer aussi autre chose que ce qu'il aime déjà (et je reconnais volontiers que c'est un peu kamikaze)."
Je ris en lisant que vous serez le 1er mai aux Colères du présent!!!   Ca tombe bien!
 
Commentaire n°7 posté par Ambre le 26/04/2011 à 23h13
Merci Ambre. Oui, il est sain que de temps en temps un nouvel arrivant vienne remettre en question nos propres affirmations (même si dans l'ensemble je ne suis pas toujours si affirmatif) pourvu qu'en effet il ait des arguments, la patience de les exposer et moi le temps d'y répondre (c'est ce dont je manque le plus ces temps-ci) : c'est là qu'on se rend compte que des goûts (car au fond je crois c'était là la divergence) et des couleurs on peut très bien discuter !
Réponse de PhA le 27/04/2011 à 15h22

vendredi 22 avril 2011

écrire, c'est lire encore...

... et c'est à lire sur Mélico, où il est question de quoi ? de la pêche aux sujets.


Commentaires

Merci pour la mention, camarade. Tu as bien raison, allez vendre une chose pareille...
Commentaire n°1 posté par Didier da le 22/04/2011 à 19h13
Mais le service de presse a-t-il bien été distribué auprès des présentateurs de la météo ? Je suis sûr qu'il y a un créneau à occuper.
Réponse de PhA le 22/04/2011 à 21h32
Après le sujet, ne pas oublier le verbe puis le complément.
Commentaire n°2 posté par Dominique Hasselmann le 23/04/2011 à 09h00
Et que le complément reste circonstanciel.
Réponse de PhA le 23/04/2011 à 17h15
Parce que vous dessinez "aussi" ?  J'aime beaucoup cette illustration. (Je vais noter le nom d'un des auteurs que vous citez, je ne le  connais pas.)
Commentaire n°3 posté par Anna de Sandre le 23/04/2011 à 15h32
Disons que j'ai un peu dessiné. (Le nom d'un des auteurs que je cite... Voyons, qui cela peut-il être... Marcel Cohen ?)
Réponse de PhA le 23/04/2011 à 17h18
Un billet court me dis-je après avoir rattrappé mon retard et appris que vos vacances vous donnent le temps d'écrire ce livre qui ne le peut, à cause du manque (vous me suivez bien-sûr). Et je clique, aïe, trop tard, un autre billet plus long cette fois, dont le sujet est le sujet sans objet en littérature. Je suis d'accord mais aussi comment voulez-vous qu'on vous classe après ça ? Atmosphérique ?
Commentaire n°4 posté par Zoë le 23/04/2011 à 16h06
En fait c'est un problème les vacances : je n'ai pas beaucoup de temps mais déjà un peu trop pour écrire le livre sur le temps qui me manque pour l'écrire, puisque précisément il me manque moins. Ahlala, que la vie est compliquée ! (En plus la catégorie "atmosphérique" est déjà occupée par mon collègue Didier da. Il ne me reste plus que la fuite en avant.)
Réponse de PhA le 23/04/2011 à 17h23
 

mercredi 20 avril 2011

la bouleversante coexistence de la présence et de l’absence

http://www.lesallusifs.com/livres/img/full_covers/full_lp001.jpgA présent, je sais que je ne me déferai plus de la peur. Elle est, sous sa forme la plus ordinaire, mon principe de réalité : tout à coup, la possibilité, l’éventualité de la catastrophe nous atteint sous les traits de l’accompli. L’imminence de la chute dans le vide, de la mort, se dévoile comme destin, comme ce qui est inscrit dès l’origine en moi. Et cet accompli est toujours en réalité le vide, celui dont nous sommes constitués, qui surgit devant nos yeux. Dans la peur ordinaire, je me reconnais sous les traits du mort qui m’a toujours habité.
Sous la forme qui vient me travailler et troubler mon sommeil dans les vieilles maisons, tout se renverse, comme dans un miroir. Je ne me reconnais pas. Je porte le masque du clown, du spectre, du grand-père, de l’habitant inconnu. Il me semble alors que c’est un principe d’irréalité qui s’active, que la nuit engendre les monstres, réveille les fantasmes.
Mais j’habille de figures mythologiques ce qui m’obsède depuis l’enfance, l’idée que quelque chose doit venir à ma rencontre, du fond le plus secret du monde, quelque chose à quoi je n’ai pas encore donné le nom de la présence comme impossibilité.
Ce qui vient me hanter, chaque nuit, c’est l’incroyable, la bouleversante coexistence de la présence et de l’absence.
 
Pierre Jourde, La Présence ,  Les Allusifs, 2011, p. 83-84.
 
Entre récit et réflexion, comme une autre branche sur les racines du Pays perdu de Pierre Jourde, la Présence inaugure de belle manière une nouvelle collection des Allusifs : les Peurs.


Commentaires

Cette ombre sans fond ni surface qui inonde sans mouiller ?
Commentaire n°1 posté par Gilbert Pinna le 21/04/2011 à 21h21

lundi 18 avril 2011

jamais contemps (billet de l’écrivain au travail)

Je suis en vacances. Je dispose d’un peu plus de temps que d’habitude. C’est un problème, pour écrire ce livre sur le temps qui me manque pour l’écrire ; ça ne me facilite pas les choses.


Commentaires

As-tu tenu compte des contretemps (sans parler des syncopes) ?
Commentaire n°1 posté par Moons le 18/04/2011 à 15h00
Je ne sais pas compter.
Réponse de PhA le 19/04/2011 à 11h10
Je ne suis pas en vacances, je dispose de très peu de temps et suis débordée, c'est pourquoi je relis Monsieur Le Conte au pied de la lettre. Et il me fait toujours rire, c'est déjà ça de gagner. Pas belle la vie : rire en travaillant ?
Commentaire n°2 posté par Pascale le 18/04/2011 à 21h13
Quelle chance !
Réponse de PhA le 19/04/2011 à 11h11
Je sens qu'il va être chouette ce nouveau livre!
Commentaire n°3 posté par Ambre le 18/04/2011 à 23h25
En fait j'ai plein de travail pendant ces vacances, je suis débordé ; je crois que j'aurai donc suffisamment peu de temps pour écrire que je n'ai pas le temps de l'écrire - donc, oui : ça se présente au mieux.
Réponse de PhA le 19/04/2011 à 11h14
"La vacance est la porte ouverte à tous les dérèglements intérieurs."
Benoît Dehort, Oeuvres complètes, tome XIX, Editions du goudron, 2014 (page 3).
Commentaire n°4 posté par Dominique Hasselmann le 19/04/2011 à 08h50
Ne m'en parle pas. ça ne devrait pas exister.
Plus sérieusement, il y a dans Moo Pak de Gabriel Josipovici, dont je parlais récemment, de très belles et très suprenantes pages sur la relation entre les contraintes de la vie quotidienne, et notamment celles du travail, et la possibilité d'écrire ; ça dessille le regard.
Réponse de PhA le 19/04/2011 à 11h19
vous semblez plaisanter, mais c'est un drame tout à fait contemporain!
Commentaire n°5 posté par Aléna le 19/04/2011 à 08h54
Oui : c'est pour ça qu'il faut le raconter.
Réponse de PhA le 19/04/2011 à 11h19
Mon plombier, qui voudrait écrire un roman-fleuve, manque de clés. Je l'ai trouvé bien amer.
Commentaire n°6 posté par Dom A. le 19/04/2011 à 10h01
Une simple petite fausse manoeuvre pourtant et tout débordera.
Réponse de PhA le 19/04/2011 à 11h20
Dans ce cas, compte sur moi pour ne pas t'aider
Commentaire n°7 posté par Moons le 19/04/2011 à 11h19
Une proposition : retournez au collège et faites comme si. Le livre s'écrira de lui-même.
Commentaire n°8 posté par Gilbert Pinna le 19/04/2011 à 13h13
C'est ce qu'on appelle la fiction.
Réponse de PhA le 19/04/2011 à 21h25
 

samedi 16 avril 2011

ils vont tous être (s)coachés



Tout de même, il y a des âmes charitables. Je me lamentais hier d’avoir été dédaignée par Marion, le coach désormais célèbre de Claro, Eric Chevillard et Didier da Silva, regardez ce que je trouve dans ma boîte aux lettres ce matin :
 
Cher Philippe Annocque,
 
Je viens d’apprendre que la relation avec votre manuscrit se dégradait ces derniers temps. Vous ne supportez plus et ne comprenez pas ses agissements. Mon métier : vous aider à appréhender la situation car ensemble nous pouvons trouver des solutions. Éduquer ou rééduquer votre texte en cours est possible à tout âge et quels que soient votre ancienneté, votre classement dans les Palmarès ou la relation que vous entretenez avec votre éditeur.
Ma méthode est simple : elle consiste à ne jamais contraindre votre chef d'œuvre. Une bonne communication amène illico à une bonne relation.
C'est un peu brutal comme entrée en matière et nous ne nous connaissons pas. Pourquoi me feriez-vous confiance d'emblée ? C'est normal.
Je me présente donc. Passionnée par le comportement textuel, j’ai toujours été entourée de virgules et de métonymies. Les allitérations tiennent aussi une grande place dans mon cœur. L’univers romanesque (notamment) est une source de richesse intarissable à mes yeux. C'est pourquoi je me suis tout naturellement orientée vers le métier d'Éducateur Comportementaliste Certifié pour tous les auteurs débutants, rebutants, peu ragoûtants, dégoûtés, déniés ou reniés, autrement dit coach pour vous les écrivains.
La Comportementaliste Certifiée que je suis et Spécialiste des Relations Homme/Texte diplômée de l'université de Back&Writ a reçu une formation spécifique qui s’appuyait sur des données scientifiques récentes : éthologie (étude objective et scientifique des comportements d'une espèce), psychologie, communication et relation homme-manuscrit. Vous pouvez donc avoir confiance en moi.
Je vous sens d’ailleurs beaucoup plus rassuré. C’est tout à fait normal car, pour moi, instaurer une complicité, échanger, redonner confiance à un chef d'œuvre en cours sont des moments de partage formidables. Je pratique d'ailleurs avec de nombreux patients des activités très stimulantes en concours mais surtout pour le plaisir et la complicité telles que le pistage syntaxique, le paragraphe mordant et sportif, le cross-lyrisme ou encore l'obéissance manuscrite et l'obéissance rythmée. Ces activités créent des liens et des complicités inoubliables avec chacun de mes patients ainsi qu'avec leur futur chef d'œuvre.
Si vous acceptez mon appui, sachez que je consacrerai beaucoup de temps avec vous à ces entraînements et que nous n'hésiterons pas à parcourir ensemble des centaines de kilomètres chaque week-end pour vous rendre heureux et mener à bien votre projet. Sachez aussi que mes méthodes d’éducation scripturale sont toujours respectueuses des poèmes et des romances ou fantaisies militaires de mes patients, que je tiens aussi compte de leur personnalité et ne les contrains jamais. Le plaisir doit être réciproque.
Je vous laisse réfléchir. N’hésitez pas à me poser toutes les questions possibles afin que nous puissions tester le plus rapidement possible ma méthode.
Bien stylistiquement,
 
Sand Ancre,
Coach pour vous les écrivains.
 
Je sens que je vais rendre jaloux mes petits camarades, Marion peut se faire un sang d’encre. Et merci au farceur qui m’a écrit mon billet du jour !


Commentaires

Philippe, je suis heureux pour vous : vos hublots vont rutiler, vous voilà sauvé des eaux.
Commentaire n°1 posté par Gilbert Pinna le 16/04/2011 à 14h32
J'appelle les laveurs de carreaux.
Réponse de PhA le 16/04/2011 à 23h31
Comique ! Je sens que je vais être jalouse :)...
Commentaire n°2 posté par Pascale le 16/04/2011 à 18h47
Facile, il faut se lamenter en bonne et due forme, comme j'ai fait hier
Réponse de PhA le 16/04/2011 à 23h32
Commentaire n°3 posté par Moons le 16/04/2011 à 19h35
Le rêve !
Réponse de PhA le 16/04/2011 à 23h32
Oh, ce n'est pas vous qui l'avez rédigé ? Pour une fois que c'était drôle...
Commentaire n°4 posté par Anna de Sandre le 16/04/2011 à 21h46
Enfin, Anna, vous me connaissez ! Croyez-vous vraiment que pourrais me prêter à ce genre de galéjade ?
Réponse de PhA le 16/04/2011 à 23h35
Le texte est savoureux, il enfonce très nettement celui de cette pôvre Marion. En revanche la vue de l'haltérophile m'a fait mal aux trapèzes
Commentaire n°5 posté par Zoë le 16/04/2011 à 22h40
C'est vrai ? Moi c'est plutôt les deltoïdes.
Réponse de PhA le 16/04/2011 à 23h36
Ce ne sont plus des tablettes mais des ballons de baudruche en chocolat! A vous dégoûter du cacao.
Votre coach(euse) a du style. Epatante! Attention les yeux! Foncez... (les yeux fermés)... à la piscine avec elle, mais laissez tomber pour le reste:)
Commentaire n°6 posté par Ambre le 17/04/2011 à 09h53
A la piscine ? Elle est fichue de me reprocher mes longueurs !
Réponse de PhA le 17/04/2011 à 17h45
L'utilisation du mot «patient» me ferait partir en courant. Car quel que soit le sens,  supplicié, devant affronter un châtiment, une épreuve pénible ou malade, ce statut vous promet de sales heures qu'elle décrit de façon enjouée. Une sadique ?(!)
On a bien souri.
Commentaire n°7 posté par ArD le 17/04/2011 à 11h58
On devine un tempérament impatient.
Réponse de PhA le 17/04/2011 à 18h14
"Passionnée par le comportement textuel", dit-elle.
Cette offre de service(s) est manifeste...
Commentaire n°8 posté par Dominique Hasselmann le 18/04/2011 à 08h12
Et moi personne ne m'aide !
Commentaire n°9 posté par L'employée aux écritures le 18/04/2011 à 10h00
Il faut faire une demande officielle.
Réponse de PhA le 19/04/2011 à 11h07

vendredi 15 avril 2011

révélation

Voilà, je sais enfin ce qui me manque. J’ai compris pourquoi ma renommée peine à franchir les frontières atmosphériques de ce monde : il me faut… un coach !
Pourquoi, mais pour- quoi certains sont-ils élus* et d’autres non ?
 
* Voir chez Claro, Eric Chevillard et Didier da Silva l’alléchante proposition que je n’ai pas reçue. Je sens que je vais en faire un ulcère.

Commentaires

bah... écoutez, je suis nulle, mais je veux bien essayer... d'ailleurs, être nul est une condition nécessaire de ce métier, non? Nécessaire ou suffisante?
Commentaire n°1 posté par Aléna le 15/04/2011 à 13h19
Mais je ne veux pas de coach, je veux juste qu'on m'en propose un !
Réponse de PhA le 15/04/2011 à 18h43
Tu prends la mouche du coach ?
Commentaire n°2 posté par Moons le 15/04/2011 à 14h07
Réponse de PhA le 15/04/2011 à 18h47
Philippe, pour l'ulcère je ne sais pas (n'espère pas) ; en revanche, si le coach ne vous a pas envoyé de lettre on dirait bien qu'il s'est bien emparé de celles composant votre dernier "Je".
(mais si vous voulez vraiment recevoir une lettre ou deux, je peux arranger ça).
(et faites comme moi : catchez les coachs)
Commentaire n°3 posté par Christophe Grossi le 15/04/2011 à 17h05
C'est vrai ? Vous feriez ça ?
(Merci pour pour mon je !)
Réponse de PhA le 15/04/2011 à 18h48
C'est vous, a droite, au-dessus des nuages?
Commentaire n°4 posté par Quotiriens le 15/04/2011 à 19h40
Ah, vous m'avez reconnu ; me voilà rassuré.
Réponse de PhA le 16/04/2011 à 23h27
Ouccccch, c'est pas une tapette, celle-là ! Prends-ca !
Commentaire n°5 posté par Moons le 15/04/2011 à 20h16
Du foot ? Je suis scotché.
Réponse de PhA le 16/04/2011 à 23h28
J'ai tapé "coach d'écrivains" sur gogol et Didier da. est à la Une de la page tout de même! Bonne pub:)
Commentaire n°6 posté par Ambre le 15/04/2011 à 22h16
Il en a la carrure.
Réponse de PhA le 16/04/2011 à 23h30
Un coach qui fait accoucher, moi ça me ferait phantasmer !
Commentaire n°7 posté par ArD le 16/04/2011 à 00h21
C'est un sage-coach.
Réponse de PhA le 16/04/2011 à 23h30
Je ne comprends pas. J'ai reçu ce mail, j'ai réfléchi et j'ai fini par débloquer les cinq mille euro d'acompte pour un premier entretien. J'ai bon espoir. J'ai très bon espoir. C'est pourquoi je supplie la Vierge Marie et tous ses saints... Non, bon, bref. Je vais être publié! Oui, oui!!
Commentaire n°8 posté par Depluloin le 16/04/2011 à 01h14
Mais bien sûr, Depluloin, vous avez très bien fait !
Réponse de PhA le 16/04/2011 à 23h31
Avez-vous bien lu la lettre ? Pour avoir recours au coach, il faut d'abord avoir un grenier.
Commentaire n°9 posté par Souricette le 16/04/2011 à 20h03
Flûte, c'est vrai. Et moi qui ai fait aménager mes combles !
Réponse de PhA le 16/04/2011 à 23h33
Allons allons, ne prends pas la mouche du coach.
En plus, tu te ruinerais. Vu tes troubles de la personnalité, c'est une équipe de coachs qu'il te faudrait, ils ne seraient jamais d'accord sur l'objectif à atteindre, ce serait des luttes d'autorité à n'en plus finir... ;-)
Commentaire n°10 posté par Didier da le 17/04/2011 à 08h31
Tu as une raison : c'est une équipe de coachs qu'il me faut. Je vais de ce pas faire modifier mon annonce (car tu as vu : j'ai déjà reçu une proposition à faire pâlir Marion).
Réponse de PhA le 17/04/2011 à 09h45
Coach toujours, tu m'intéresse.
Commentaire n°11 posté par L...............uC de chez Smith en face. le 20/04/2011 à 07h38
 

jeudi 14 avril 2011

clarifier l’air afin que quelque chose puisse être dit

Ecrire n’est possible qu’au prix d’un compromis : seul existera le livre qui dit le livre rêvé. Parfois c’est pas plus mal, me disais-je avant-hier en écoutant Gabriel Josipovici, auteur de Moo Pak, et son traducteur Bernard Hœpffner. C’était donc au Comptoir des Mots (où d’ailleurs la présence de Jacques Roubaud donnait comme un fil discret à ma journée).
 
J’ai écrit afin de faire sortir les confusions, les dérobades, comme on presse une serviette pour en faire sortir l’eau. Pas pour dire quelque chose mais pour clarifier l’air afin que quelque chose puisse être dit. Je n’y suis jamais parvenu, me dit-il alors que nous faisions demi-tour pour faire le tour des étangs. Mes mots ont été gauches et chaque phrase que j’ai écrite, au lieu de se tenir là comme une pierre, ne portait que les échos de ma propre voix grincheuse et parfois irascible. C’est pour cela, je suppose, qu’on essaye toujours encore et encore, dit-il. On espère toujours atteindre une voix qui n’a rien à voir avec soi-même, qui est, d’une certaine façon, radicalement autre que celle dont se sert chaque jour pour les simples transactions de cette journée. Mais évidemment on ne le fait jamais, dit-il. Nous nous éloignâmes des étangs à travers les fougères et la bruyère. Les chevreuils ne se montraient pas.
 
Gabriel Josipovici, Moo Pak, Quidam, 2011, p. 167.

Commentaires

Souvent, je rêve que j'écris en marchant dans ma tête. C'est grave ? 
Commentaire n°1 posté par Moons le 14/04/2011 à 10h40
L'un des tout premiers textes que j'ai écrit qui vaille un peu quelque chose (vers 16 ou 17 ans), je l'ai écrit en marchant.
Réponse de PhA le 15/04/2011 à 10h00
... les phrases qui se tiennent là comme des pierres et le livre est une église ou un cimetière ?
Commentaire n°2 posté par Gilbert Pinna le 14/04/2011 à 19h17
Précisément, elles ne tiennent pas (elles ne tiennent peut-être jamais).
Réponse de PhA le 15/04/2011 à 10h04
 

lundi 11 avril 2011

pourquoi j’aime les contraintes

 

Parce que j’ai pas le choix, tiens. Les contraintes formelles, que ce soient celles ludiques mais pas que de Monsieur Le Comte ou celle, plus essentiellement significative, de l’effacement de la personne grammaticale dans Liquide, ou celles aussi bien non formelles, d’ailleurs, si toutefois cela a un sens, de la circonscription du sujet, par exemple, les matheux appelleraient ça le domaine de définition, bref, les contraintes conscientes de ceux qui s’en rajoutent ou oubliées de la plus simple mise en forme,
comment par l’écriture mieux rendre compte du sort de celui qui s’efforce de mener une vie normale-alors-que (disons une vie qui n’embarrasse pas trop ses proches), c’est-à-dire n’importe qui, et qui plus est de celui qui essaie concilier celle-là (la vie normale-alors-que) avec cette autre (l’écriture), c’est-à-dire à peu près n’importe kiki écrit ? Au fond j’aime pas les contraintes mais j’ai pas le choix c’est pour ça que je les choisis.



Commentaires

Pour ma part je n'aime pas les contraintes, c'est pourquoi je ne les choisis pas - et que je ne suis pas publié puisque écrire en constitue une sacrée de contrainte!
(A propos de sacré, ce joug christique... Pourquoi ne pas avoir choisi une croix, une vraie, "tout simplement"!:)
Commentaire n°1 posté par Depluloin le 11/04/2011 à 16h16
Mais absolument : l'objectif de la publication (surtout chez certains éditeurs) crée des contraintes où, à trop bien les respecter, l'auteur perd de son authenticité.
Réponse de PhA le 11/04/2011 à 23h42
On a toujours le choix : ne pas choisir est encore une manière de choisir et choisir pour dire qu'on ne choisit pas est une autre façon de choisir encore et du coup, ne pas choisir de choisir ce qu'on prétend ne pas choisir est, derechef, une manière d'affirmer son choix sous la forme illusoire d'un non-choix contraint lui-même sur fond d'un choix plus central relativement au positionnement du choix recentré comme non-choix non positionnel-de-soi...Or, la contrainte, précisément, se donne comme... je continue ?
Commentaire n°2 posté par Gilbert Pinna le 11/04/2011 à 16h39
Avec plaisir !
Réponse de PhA le 11/04/2011 à 23h44
j'aime beaucoup ce billet, beaucoup, parce que j'y vois l'essence de la langue.
Commentaire n°3 posté par Aléna le 11/04/2011 à 21h45
Pourtant je ne l'ai guère léché.
Réponse de PhA le 11/04/2011 à 23h46
C'était sans compet sans Gilbert qui, vous le savez, appartient à la fameuse bande...
Commentaire n°4 posté par Aléna le 11/04/2011 à 21h46
Ah là, c'est moi qui suis largué.
Réponse de PhA le 11/04/2011 à 23h48
Twitter a instauré une contrainte mondiale (140 caractères) mais elle est déjà dépassée par les photos ou vidéos que l'on peut adjoindre aux messages : ceux-ci ne sont plus alors, parfois, que leur introduction.
La contrainte de Perec (sa fameuse disparition) tenait aussi dans son nom : combien de personnes affublent la deuxième lettre d'un accent aigu !
Tout est contrainte : c'est l'étreinte même de la vie (a fortiori celle de l'écriture, me semble-t-il).
Mais aucune réponse n'est obligatoire !
Commentaire n°5 posté par Dominique Hasselmann le 12/04/2011 à 09h27
Vais-je choisir la contrainte Twitter ? A voir.
Réponse de PhA le 13/04/2011 à 16h28
Etre contraint de soi, de l'ego-tage, toujours.
Alors que l'ecriture peut etre le seul lieu reel de liberte, l'ecrit lu devient contrainte.
ou pas.
Commentaire n°6 posté par Quotiriens le 12/04/2011 à 18h39
La liberté de l'écriture est vite perdue : qu'on écrive quelques mots et déjà tout ce que l'on écrira se trouve contraint par ce qu'on vient d'écrire.
Réponse de PhA le 13/04/2011 à 16h33
Perec? L'ai-je bien entendu? ... Oui! ... (J'ai un sentiment partagé sur cet auteur. Sentiment que je partage, d'ailleurs.)
Commentaire n°7 posté par Depluloin le 12/04/2011 à 22h36
Perec ? Où ça ?
Réponse de PhA le 13/04/2011 à 16h34
Ah mais! on prépare le bac philo je vois (0_0)
Se contraindre pour se libérer!
Commentaire n°8 posté par Ambre le 13/04/2011 à 21h45
C'est pas moi c'est Gilbert. Moi je me contente de faire ce que je peux.
(ça fait plaisir, Ambre !)
Réponse de PhA le 14/04/2011 à 00h33
Gilbert? Normal, c'est un philosophe! Question pour lui :
Sujet du bac : "A quoi sert l'art"?
Commentaire n°9 posté par Ambre le 14/04/2011 à 09h54
 

dimanche 10 avril 2011

Moo Pak au Comptoir des Mots

http://www.quidamediteur.com/imagenes/portadas/MooPakG.jpg 
Et parfois je pense, dit-il, que mon rôle est de démontrer ce qui se passe quand on a le besoin d’écrire sans en avoir ni le talent, ni le savoir, ni l’expérience, quand manque le talent mais que le besoin refuse de s’éteindre. Car en soi c’est après tout assez intéressant et sans doute une condition qui, même si elle n’est pas générale et universelle, ne m’est pas spécifique.
 
Gabriel Josipovici, Moo Pak, Quidam 2011, p. 107.
 
Mardi 12 avril à 20 heures (c’est après-demain), Gabriel Josipovici et son traducteur Bernard Hœpffner seront les invités du Comptoir des Mots, 239 rue des Pyrénées, dans le 20e, métro Gambetta. Faut  venir, ça va être chouette*.
Un autre petit extrait ici.
 
* Deux séances de rattrapage sont quand même prévues pour les absents :
 
- mercredi 13 avril à 20h, à la librairie Le Livre (24, place du Grand Marché - 37000 Tours)
- jeudi 14 avril à 19h, à la librairie Village Voice (6, rue Princesse - 75006 Paris - M° Saint-Germain / Mabillon)

Commentaires

Il y a des jours, en effet, où je suis le même quidam
Commentaire n°1 posté par Moons le 10/04/2011 à 10h45
C'est bien, il faut le suivre.
Réponse de PhA le 11/04/2011 à 23h33
Sans doute un dur, si l'on en croit son clavier à touches arrondies.
Commentaire n°2 posté par Dominique Hasselmann le 10/04/2011 à 12h35
En tout cas c'est un bon !
Réponse de PhA le 11/04/2011 à 23h34
ce qui se passe quand on a le besoin d’écrire sans en avoir ni le talent, ni le savoir, ni l’expérience, quand manque le talent mais que le besoin refuse de s’éteindre. Voilà qui va  toucher chacun personnellement.
Commentaire n°3 posté par Zoë le 10/04/2011 à 23h09
ça...
Réponse de PhA le 11/04/2011 à 23h36
je vous remercie pour cette concision
Commentaire n°4 posté par Zoë le 11/04/2011 à 23h44
Ou comment résumer sa vie en deux lettres.
Réponse de PhA le 11/04/2011 à 23h50
Mieux que trois sans doute.
Commentaire n°5 posté par Zoë le 11/04/2011 à 23h54
Malgré la sonorité du titre, Moo Pak s'apparente bien plus à une promenade introspective de bon aloi, qu'à un poème sud-coréen évoquant les bois. Des questions qui, un jour ou l'autre, investissent notre esprit, et qui pourtant, restent bien souvent les spectres de nos pensées.
Commentaire n°6 posté par edwood le 31/05/2011 à 21h24
Ah, Moo Pak ! ça parle et ça me parle (notamment cette idée d'un livre qui est là pour en figurer un autre inacessible).
Réponse de PhA le 31/05/2011 à 21h50

mercredi 6 avril 2011

Une crise de la littérature contemporaine ?

Si par littérature on entend création littéraire, écriture, alors il n’y a pas de crise de la littérature contemporaine. A témoin par exemple mon hublot droit, en bas à gauche – par lequel pourtant on ne voit pas grand-chose, par rapport à l’étendue du paysage.
Si par littérature on entend aussi lecture – lecture de cette littérature –, alors il y a une crise majeure. Si par ce même hublot droit peu de noms vous sont familiers, c’en est assurément un indice. On n’est pas sorti de l’auberge. A la vôtre quand même.
 
 
(Comme Alain G a eu la bonne idée de venir me chatouiller un peu sur le versant de l'écriture, merci à lui, l'essentiel du propos, développé un peu dans le désordre, est désormais dans les commentaires. Du coup je me dis qu'il faudra bien que je développe dans ces Hublots deux ou trois idées sur l'autre versant, celui de la crise de la représentation.)


Commentaires

Cher phA,
Pour moi il n’y  a pas de crise de la littérature en général, mais uniquement un profond retard de la littérature française. Volodine l’incarne d’ailleurs très bien à lui tout seul, avec ses thématiques datant d’un vingtième siècle révolu.  C’est d’ailleurs l’évolution même de lalittérature en France qui a créé cette « fracture » entre la littérature et son lectorat, instituant des courants, des sous-courants, et parfois même des champs d’expérimentation si coupés du réel (le nouveau roman, pour ne citer que lui) que la « fracture » est aujourd’hui définitivement consommée. Pendant ce temps, la littérature, elle, continuait à exister, le monde évoluait, les techniques se perfectionnaient, tandis qu’un certain nombre d’écrivains (je pense par exemple à Chevillard) continuaient à vouloir s’abstenir de créer une quelconque histoire parce que ça les ennuyait, ou que c’est ce qu’on leur avait appris à l’école du bien écrire – qu’une histoire, ça ne se faisait plus – ou encore, pour paraphraser Céline, qu’il n’y avait que le style qui comptait (et dieu sait combien d’autres l’ont montré depuis, à l’instar de Nabokov, mais en y adjoignant un semblant d’histoire)… Tout cela était peut-être valable au vingtième siècle, dans les années cinquante, voire même à l’orée des années quatre-vingts (quand les ordinateurs n’avaient pas encore envahi nos vies). Mais à l’heure où les gens se gavent de téléréalité et de séries télé américaines, le scénario a plus que jamais son rôle à jouer dans la culture (non pas évidement comme le fait Djian, avec ses misérables "copier coller" de Doggy Bags) mais à travers la reconquête, pour la littérature, d’un certain nombre de charmes dus à la simple narration d’un histoire qui font que l’on n'a pas l’impression, en tant que lecteur, d’être en dehors, mais en dedans.
(Cela dit, j’adore les romans où il n’y a pas d’histoire (c’est-à-dire des histoires à l’intérieur des histoires), mais il faut avoir les épaules pour en écrire…)
 
Commentaire n°1 posté par alain g. le 06/04/2011 à 18h43
 
J’ai un peu de mal à vous suivre, Alain. Concernant Volodine, je le considère comme un auteur majeur, mais ce n’est pas parce que je trouve que ses thématiques sont en phase avec notre époque. Etre en phase avec son époque, je ne suis pas bien sûr de savoir ce que ça veut dire (mais vous n’avez pas employé cette expression, j’en conviens) ; mais ça m’apparaît plutôt comme une faiblesse : l’air du temps, un coup de vent et il a changé ; d’ailleurs chez nous ce sont plutôt les auteurs qui recherchent l’air du temps qui à mes yeux se fourvoient. En revanche la question de l’existence de l’humanité, ça peut valoir la peine d’écrire autour, pourquoi pas – même si ce n’est pas ça non plus qui fait le talent si singulier de Volodine, qui n’incarne que lui-même tant il est sans voisins.
Je sais aussi qu’il est de bon ton aujourd’hui de fustiger le nouveau roman. Personnellement, je n’ai jamais bien su que c’était ; j’ai lu quelques livres (pas tant que ça) qu’on y avait classés ; je n’ai pas bien compris les critères de classification. Je me souviens, gamin ou presque, d’avoir lu la Modification ; franchement je ne vois pas comment on peut faire moins coupé du réel, ça y colle presque un peu trop (si tant est qu’on sache ce qu’est le réel – ce qui me paraît d’ailleurs un doute plutôt fertile).
Peut-on reprocher à Chevillard de ne pas vouloir créer d’histoires ? Il ne se revendique pas romancier, et ma foi pourquoi faudrait-il que toute la littérature soit narrative ? Il y a quelque chose de très imbécile dans le dessein de raconter une histoire, il faut être soi-même un héros pour s’y lancer – j’admire l’héroïsme, c’est pourquoi je ne crache pas sur les auteurs qui surmontent cet obstacle énorme. Chevillard aussi est un aventurier, mais qui revient à son aventure primitive, l’écriture ; ce qu’il fait proliférer à partir de ce qui pourrait passer pour presque rien m’émeut : c’est la condition même de l’écrivain.
La littérature n’a jamais intéressé grand monde, je doute que les alter ego d’autrefois des gens qui aujourd’hui se gavent de télé-réalité et de séries américaines (je dis bien, comme vous, « se gavent » ; je ne crache pas d’office sur les séries américaines, au contraire) aient été des lecteurs de Stendhal ou de Flaubert.
La rupture, réelle, entre le public (je parle des gens qui lisent) et la littérature française contemporaine tient à autre chose qu’à la littérature elle-même ; un jour, quand j’aurai le temps, j’essaierai de dire ce que j’en pense.
(Moi aussi, j’ai un faible coupable pour les romans sans histoire, je le reconnais – mais pas que.)
Réponse de PhA le 06/04/2011 à 20h47
ben après ça, je n'ose plus rien dire.
(non, c'est faux, c'est juste pour ne pas dire...)
:))
Commentaire n°2 posté par Aléna le 06/04/2011 à 20h42
J'ajoute quand même : qu'est-ce que ce sera quand ce sera la crise de la crise...?
Commentaire n°3 posté par Aléna le 06/04/2011 à 20h43
La crise de la crise ? Je l'attends avec impatience !
Réponse de PhA le 06/04/2011 à 21h19
Je suis passée en deux jours de Grande Ourse, de Romain Verger, et sa puissante écriture, à Victoria Horton et ses Attachements. Une autre forme de "narration". J'en suis sortie bouleversée. L'un parce qu'il m'a prise aux tripes et l'autre parce qu'elle m'a prise aux tripes. Comme au sortir de ton Liquide, Philippe. Comment te dire ? Il y a plusieurs formes, mais le fond reste le même. C'est le privilège des écrivains de nous dire qu'il n'y a qu'une seule et même émotion, quelle que soit la forme qu'elle utilise.
Commentaire n°4 posté par Moons le 06/04/2011 à 23h14
Heureux d'avoir su prescrire !
Réponse de PhA le 07/04/2011 à 14h10
PS : pour le moment, dans ma pile à lire, il y a Philippe Jaccottet, Bernard Noël, Pierre-Jean Jouve, Jules Laforgue, Sam Shepard, Ersi Sotiropoulos, Denis Decourchelle. Suis pas près de dormir.
Commentaire n°5 posté par Moons le 06/04/2011 à 23h20
On a bien le temps de dormir.
Réponse de PhA le 07/04/2011 à 14h11
Un p'tit coup de bluz Philippe? Consultez votre blogrank et multiplié le par mille.
(Moons, je vous ai ajouté des livres sur mon blog, vous passerez me voir à la récréation)
Commentaire n°6 posté par Souricette le 06/04/2011 à 23h26
Mon blogrank ? Un babiroussa est encore passé par là ?
Réponse de PhA le 07/04/2011 à 14h12
J'ai parfois un problème avec l'impératif et autres coutumes de la langue.
Je n'arrive pas à mettre la main sur Monsieur le Comte, vous m'aviez pourtant dit qu'il se promenait avec les autres faces de boucs.
Dites-lui, à l'occasion que Thaddée Us le cherche pour s'afficher crânement en sa compagnie.
Commentaire n°7 posté par Souricette le 06/04/2011 à 23h36
Farcebouque ? Oh la la, ça marche très bizarrement, cette chose ; je n'ai pas tout compris.
Réponse de PhA le 07/04/2011 à 14h14
Je clique, je clique:  il ne se passe rien.
 
Commentaire n°8 posté par L'entrée des sauvages le 07/04/2011 à 00h09
Prenez votre souris magique.
Réponse de PhA le 07/04/2011 à 14h14
Il me semble que la colonne de gauche travaille à élever la colonne de droite ; et la littérature avance sur des échasses dissymétriques – clopin-clopant.
Commentaire n°9 posté par David Marsac le 07/04/2011 à 08h07
Oui, c'est bancale, cette affaire ; je me le dis tous les jours.
Réponse de PhA le 07/04/2011 à 14h15
 
Cher phA,
Je comprends bien vos arguments. D’ailleurs je ne rechigne pas moi-même à me vautrer dans les délices d’une écriture soignée, tant qu’elle me parle de quelque chose. Ce que je critique, c’est plutôt la propension justement à n’écrire qu’autour de la question de l’écrivain, de l’écriture, comme vous le dites, et comme le fait selon moi Chevillard – une écriture repliée sur elle-même, autour de ses propres effets (quand je le lis j’ai parfois l’impression qu’il se fait immensément plaisir, et je me dis : si seulement j’avais au moins autant de plaisir à le lire que lui semble avoir à en écrire…). Alors je vous demande bien naïvement : comment peut-on faire plus « coupé » du lectorat (ou si vous préférez, comme peut-on écrire autant pour les écrivains, ou les « écrivants » ?). Je n’ai pas lu tous les auteurs de votre hublot en bas à gauche (d’ailleurs l’aurais-je pu ?) mais enfin un certain nombre, et je vous encourage à mettre en perspective ces auteurs avec ceux de langues étrangères, si vous ne l’avez pas déjà trop fait. Je ne prône pas abusivement la suprématie de l’étranger : j’aime mon pays, et sa culture. Mais je considère que les cas d’école qui y culminent, la littérature comme vous dites malade dans sa représentation, la littérature de style rien que pour le style (il y en a), et bien évidemment toute la lie du roman contemporain que l’on érige en tant que littérature alors qu’il n’y en pas une once (cf La littérature sans estomac) lui nuisent plus qu’autre chose, et contribuent et à sa lente mais irrémédiable chute. J’aimerais croire que ce n’est pas que la création qui est en cause (et uniquement la représentation : les media, les prescripteurs, le temps qui faut qu’il faut pour trier le bon grain de l’ivraie…) Mais trop de livres  – et je suis un lecteur– me sont tombés des mains dans un soupir proche de l’anorexie en laissant penser : mais comment peut-on être aussi peu créatif ?... Et cela je l’attribue sans conteste à l’évolution de la littérature française (repliée sur elle-même, comme bien d’autres pans de notre culture à l’heure actuelle, mais également de notre peuple, et bien sûr de notre politique). Un ami m’a dit un jour que les petites époques ne pouvaient pas engendrer de grands écrivains. Je ne suis bien évidement pas d’accord avec ce genre de généralités. Mais je crois tout de même que les petites époques ne contribuent pas à les voir, s’il y en a, et que la fermeture d’esprit (ou le suivisme) dont font preuve trop de puissance « décidantes » dans notre pays ne participent pas non plus à les faire ressortir. Maintenant c’est sûr que la représentation est aussi en cause comme vous le laissez entendre de ce repli, dans cette « crise ». Mais elle n’est selon moi qu’un épiphénomène, une manifestation tardive. Ce qui est à l’oeuvre d’après moi, c’est la non propension de nos écrivains à prendre le monde à bras le corps (c’est-à-dire le monde désormais mondialisé, « technicisant », médiatiquement oppressant, socialement inhibant, de plus en plus désincarné dans nos rapport à l’autre, etc…) comme le font déjà la plupart des auteurs anglo-saxons, sud-américains, portugais, etc… pour en faire – pourquoi pas ?, je ne crois pas que le roman et la littérature soient si indissociables– de la Littérature. Après je suis bien d’accord avec vous sur Flaubert et Stendhal – encore que ce dernier était finalement assez accessible, même s’il n’a pas eu la réception qu’il mérite– et je ne prétends pas que la « vraie » littérature ne soit pas élitiste. C’est juste dommage qu’elle ne soit qu’élitiste (surtout par les temps qui courent où la gangrène culturelle gagne, et où ce ne sont pas le cinéma français et la téléréalité qui vont nous en préserver)
Bien cordialement, 
(un dernier mot tout de même sur « être en phase avec son époque » :  bien évidement, ça ne signifie pas pour moi être dans l’air du temps (ou barder de gadgets technologiques son œuvre – non, mais peut-être avoir su suffisamment capter cet "air du temps", justement, pour le transmuer en art, rien que de l’alchimie finalement) : Stendhal et Flaubert le faisaient, dans ce qu’ils écrivaient ; Volodine ne les fait plus vraiment, à mon avis.)
(tout cela revient finalement à ce que vous énoncez dans votre hublot supérieur : l’époque est difficile à percer, remplie de faux semblants, mais ce n’est pas impossible) 
Commentaire n°10 posté par alain le 07/04/2011 à 10h31
 
Parler de quelque chose ? Mais enfin Alain, rien n’est-il pas évidemment quelque chose ? L’écrivain, ou plutôt l’écriture, c’est l’homme aussi ; en littérature, c’est même l’homme immédiat. Bien sûr le sujet est plutôt à éviter, insaisissable qu’il est – piquant comme le hérisson sur la table de Chevillard. Mais ce dernier ne résume pas la littérature française contemporaine, tant s’en faut ; il ne résume même pas mon hublot droit qui lui-même ne montre que mes goûts – lesquels d’ailleurs sont plutôt disparates : vous ne me parlez que de Chevillard et de Volodine, et pas un mot sur Federman, sur Jérôme Lafargue, Hubert Mingarelli, Pierre Alferi, Eugène Savitzkaya, Thierry Beinstingel et bien d’autres qui sont aussi éloignés de ces deux-là qu’ils le sont les uns des autres (nul doute qu’en cherchant bien vous y trouveriez à infirmer différemment votre parenthèse sur la non propension de nos écrivains à prendre le monde à bras le corps) : en fait je serais bien en peine de tracer une ligne (ou même deux ou trois comme on le fait souvent) dans cette littérature – et serait-ce possible qu’il faudrait m’en imputer la responsabilité, puisqu’il ne s’agit là que de mes goûts.
Je ne suis pas bien sûr qu’il soit vraiment pertinent, comme le fait si souvent la presse, de comparer la littérature française avec la littérature étrangère. D’abord, laquelle ? Aujourd’hui, par exemple, les lecteurs français ne lisent guère les auteurs allemands contemporains – c’est peut-être d’ailleurs là un indice de la vitalité de la littérature allemande, à creuser. Déjà, la masse de la production française est telle qu’il est assez vain de vouloir la résumer ; il suffit de s’y plonger vraiment pour s’en rendre compte ; que dire alors de la production mondiale ?
Que trop de livres vous soient tombés des mains, je le comprends sans peine ; il n’est pas si facile de s’orienter – et là il y aurait beaucoup à dire –, qui plus est lorsque par chance on tombe sur un livre appartenant à une grande œuvre, on n’est pas toujours à même de s’en rendre compte d’emblée, il faut souvent en lire plusieurs ; l’œuvre n’est pas nécessairement à l’échelle du livre, et n’en lire qu’un seul c’est souvent comme regarder un vaste paysage par une mesquine lorgnette.
Je ne développerai concernant les relations entre cette crise de la littérature et notre société, a priori je suis assez d’accord ; la tendance au formatage est évidente, elle concerne une part considérable de la production. Qu’importe ? Si quelques dizaines de livres bons ou très bons sortent dans l’année, à mes yeux c’est bien suffisant pour affirmer que la création se porte à merveille ; si hélas très souvent ils ont peu de visibilité, c’est qu’en effet il y a une crise, celle de la représentation.
Ce qui me fait dire aussi qu’il n’y a pas de crise de la création littéraire, c’est que je ne suis pas bien sûr que c’était mieux avant. Petite époque peut-être, mais je dois reconnaître que certaines des œuvres du XXe siècle qu’il était de bon ton d’admirer m’ennuient plutôt (la Peste) voire terriblement (la Condition humaine ou l’Espoir – enfin, pour les quelques dizaines de pages que je suis parvenu à lire).
Merci en tout cas de me forcer à développer un peu !
Réponse de PhA le 07/04/2011 à 19h02
Ca y est ! J'ai lu "Un roman français". C'est un peu délétère.
Y'a pas, j'préfère Apollinaire, et ses odeurs d'éther !
Commentaire n°11 posté par Dominique Autrou le 07/04/2011 à 13h08
Lire en hélicoptère,
ça fiche le mal de mer.
Réponse de PhA le 07/04/2011 à 14h17
Merci Alain, j'approuve entièrement votre intervention. Peut-être parce que je suis lectrice, aussi.
Commentaire n°12 posté par Pascale le 07/04/2011 à 19h04
C'est vrai, et même de bonne littérature française !
Réponse de PhA le 07/04/2011 à 19h12
Française, oui, et étrangère aussi. Tu sais, je lis au-delà des frontières et je pense que c'est inutile d'essayer d'émettre un avis sur la littérature aujourd'hui car personne ne peut lire tout ce qui s'écrit dans le monde. Donc l'avis sera toujours parcellaire et subjectif. Je pense que tant qu'on trouve ce qui nourrit, la vie est belle. Quand on ne trouvera plus, on relira, pas de panique.
Commentaire n°13 posté par Pascale le 07/04/2011 à 20h24
Eh bien au fond je suis complètement d'accord avec ça. C'est pour ça que ça m'énerve ces jugements lapidaires qu'on lit souvent dans la presse.
Réponse de PhA le 07/04/2011 à 21h44
Le rien ?... Allons, cher phA, ne serait-ce pas là un mot un peu pompeux ? Je suis comme H.Haddad de ceux qui pensent qu’il ne faut pas s’illusionner sur notre capacité à parler du vide, ni de l’inénarrable spleen de notre être profond (rappelez-vous de Senancour, en dépit de l’écriture, ça plombe…) A moins que vous n’envisagiez le « rien » que comme un point de départ à la narration (Nabokov, Lowry, Dom quichotte), auquel cas je vous rejoins gaillardement. Concernant les auteurs que vous m’avez cités, je n’en connais que deux, malheureusement (Mingarelli et Beinstingel, et un tout petit peu Lafargue) et je ne crois pas que l’on puisse parler de grands (ou de crème des crèmes, comme vous l’aviez évoqué avec max léon) ; c’est pourquoi j’avais choisi de développer sur Chevillard  et Volodine, autrement plus connus du « grand public » (car rappelez vous qu’il était question de cela dans mon premier com : de la littérature coupée de son lectorat ; c’est sûr qu’avec le « rien »…). Quant aux autres auteurs, je me fais une joie par avance de  les programmer sur ma table de nuit, en me promettant d’en lire au moins deux de chaque (tout comme je l’ai fait pour vous), tant il est vrai que, si ne lire qu’un seul livre, c’est comme de regarder un grand paysage par une mesquine lorgnette, de le voir trop entièrement peut parfois aussi créer une sensation de doute un peu vertigineux. Je ne compare pas la littérature étrangère à celle française (ce serait bien présomptueux), mais uniquement l’ennui que j’éprouve respectivement face à chacune d’elle. Vous ne pouvez quand même pas nier que les auteurs français sont incomparablement plus ennuyeux que la majeure partie des auteurs américains, ou sud-américains, on dirait que c’en est presque devenu une règle, comme si le poids de notre histoire littéraire (et peut-être aussi de notre passé tout court) nous imposait de faire suer le lecteur. Je suis désolé, mais il y a encore quelques oeuvres (et des grandes) dans lesquels l’effort demandé au nom de l’exigence se voit davantage récompensé que dans ce je lis aujourd’hui en France (même si, vous avez raison sur ce point, le recul historique n’est encore bien sûr pas suffisant pour en juger).  D’une manière générale, je trouve que vous noyez trop le poisson dans du relativisme et des références, comme on le fait souvent de nos jours. Faire une généralité, ou formuler une loi, ce n’est pas non plus un risque physique insurmontable (Proust l’a exercé) - on s’en remet, et ça fait même avancer un peu les choses à l’heure où la psychologie de masse et le marketing nous rangent de plus en plus dans des petites catégories de gens (qu’on le veuille ou non). (C’est là l’un des mérites que je reconnais au Houellebecq des débuts, d’avoir introduit la digression sociologique dans le roman, et rien que pour cela il est encore aujourd’hui plus moderne que bien des Français, en dépit de son écriture calamiteuse).  Je crois donc que, tout autant que vous ne pouvez pas dire que la littérature se porte bien à l’aune de vos hublots personnels, je ne puis pas non plus afirmer qu’elle est en péril à partir de mon expérience ou de mon ennui. Ce serait dans les deux cas bien égocentrique. Mais il y a crise, néanmoins, nous sommes d’accord pour le reconnaître, et j’ai l’impression que de la limiter à sa représentation revient à considérer seulement la partie émergée de l’iceberg - i.e. aller vers le naufrage.


Commentaire n°14 posté par alain le 07/04/2011 à 21h45
Je pensais plutôt à rien qu'au rien ; à Flaubert, à Beckett ; et c'est aussi une private joke de ces hublots. "Crème des crèmes", comme vous y allez. Je cite ces différents auteurs parce qu'ils sont différents, très différents ; j'aurais pu en prendre d'autres. Je ne déciderai pas de leur grandeur, il y a bien des "grands" qu'on pourrait remettre en question chez nos anciens, en revanche ceux-ci me paraissent très justes dans ce qu'ils font.
Je ne suis pas du tout en mesure de faire la comparaison que vous me demandez : je ne connais pas la majeure partie des auteurs américains, ni sud-américains, ni français ; je dois avouer que je vous envie un peu d'avoir le temps et la capacité de lire autant. C'est sans doute ce qui me fait noyer le poisson, ainsi que mon rapport très sensible aux différentes tentatives de classification. Vous aurez compris que je ne ferai jamais un grand théoricien.
C'est rigolo ce que vous dites sur Houellebecq (que j'ai peu lu : deux livres) : ses digressions sociologiques (notamment celles de Plateforme), c'est précisément ce que je trouve de profondément ennuyeux chez lui. En revanche, je ne trouve pas son écriture calamiteuse ; je sais qu'on la lui reproche mais je trouve qu'elle lui va.
Concernant mon affirmation sur la vitalité de notre littérature, je me suis peut-être mal fait comprendre. J'estime juste qu'une littérature capable de me fournir, à moi (car oui, je suis un lecteur complètement égocentrique) une trentaine ou une quarantaine de livres par an au moins assez bons, voire bien mieux que ça, me convient parfaitement. Davantage, c'est de toutes façons plus que je n'en puis consommer. Dans la mesure où je n'ai pas l'impression que ça ait pu être vraiment mieux autrefois, je ne m'alarme pas.
Réponse de PhA le 07/04/2011 à 22h46
Vous avez raison, calamiteux est un terme exagéré pour l’écriture de Houellebecq. Disons que ses poèmes étaient exécrables. Concernant ses digressions, je suis d’accord avec vous pour admettre qu’elles peuvent être ennuyeuses, mais c’est à ce prix je crois que se fait une certaine littérature ;  ce que j’y apprécie, c’est le fait qu’il les introduise, pour parler réellement de notre temps, en tout cas ce que j’en perçois (ce n’est pas tant leur contenu que le génie de leur prolifération que je juge intéressante). J’avais oublié d’abonder du coup dans votre sens au sujet de Malraux : oui, évidemment, et même certains de ses contemporains n’en étaient pas dupes. Sinon, je ne lis pas tant que ça, non, juste de plus en plus en « vieillissant », pour conjurer l’ennui de moins écrire.
Commentaire n°15 posté par alain le 07/04/2011 à 23h42
En fait ces digressions sociologiques, pour le coup, me paraissent vraiment un défaut de notre époque. Houellebecq n'est pas seul concerné, la Télévision de Toussaint m'a bien déçu pour les mêmes raisons ; et je suis sûr que mon instinct m'a fait éviter d'autres livres d'auteurs moins intéressants frappés du même défaut. Je lis ces passages comme une sorte de caution, voyez donc comme j'ai un vrai rapport au monde dans lequel je vis, alors qu'on y trouve les mêmes raccourcis, le même schématisme qui sont à la limite excusables dans la presse par souci d'efficacité, mais qui donnent, du moins à mes yeux, un caractère terriblement artificiel à cette littérature. Bien sûr, que ça plaise à certains journalistes, ça se comprend. Enfin, dire le monde, c'est pas bien facile. En tout cas c'était sympa de venir me titiller un peu sur la question, même si je me rends bien compte que je n'ai pas forcément été très convaincant.
Réponse de PhA le 08/04/2011 à 08h26
Alain G. écrit : "Mais à l’heure où les gens se gavent de téléréalité et de séries télé américaines, le scénario a plus que jamais son rôle à jouer dans la culture (non pas évidement comme le fait Djian, avec ses misérables "copier coller" de Doggy Bags) mais à travers la reconquête, pour la littérature, d’un certain nombre de charmes dus à la simple narration d’un histoire qui font que l’on n'a pas l’impression, en tant que lecteur, d’être en dehors, mais en dedans."
Il faudrait que ce monsieur aille voir du côté de TF1, ils recrutent peut-être (Hélène Cixous est heureusement inimitable).
Commentaire n°16 posté par Dominique Hasselmann le 08/04/2011 à 09h43
Alain aime les romans, Dominique, et pense que la reconquête du public passe le (bon, évidemment) roman ; honnêtement ça se défend et il ne manque pas d'arguments. Pour ma part j'ai tendance à penser qu'il n'est pas forcément juste d'aller dans le goût du public, mais qu'il vaut mieux amener le public à aimer aussi autre chose que ce qu'il aime déjà (et je reconnais volontiers que c'est un peu kamikaze). C'est là que je constate une crise de la représentation et de la réception.
Réponse de PhA le 08/04/2011 à 10h46
Je pense surtout que l'offre doit être variée et qu'il est kamikaze de penser détenir LA vérité. En tant que lectrice, selon les saisons, les moments, les envies, je suis attirée par des livres très différents, et je suis contente de pouvoir piocher dans tous les registres. C'est surtout cela qui m'importe.
Commentaire n°17 posté par Pascale le 08/04/2011 à 13h41
En général je me défends de penser, mais il m'arrive de faire preuve d'inadvertance.
Réponse de PhA le 08/04/2011 à 19h38
 
@dominique hasselman : voilà précisément  le genre de raccourcis qui fait que le fossé s’agrandit entre la soi-disant « véritable culture » et la littérature en général. Je n’ai jamais écrit qu’il fallait aller dans le sens des goûts du public (plutôt mourir !). Mais je n’ai pour ma part aucun mépris contempteur pour ce genre de divertissements de masse (ni aucune complaisance, du reste, je n’en regarde pas). Je connais par contre quelqu’un qui en conçoit, je sais donc de quoi je parle.
@phA : définitivement non je ne suis pas d’accord là-dessus. Pour moi vous confondez la cause et la conséquence. Ce ne sont pas les digressions qui sont un défaut de notre époque, mais notre société qui les a peut-être développées au point qu’elles sont devenues à vos yeux comme une « caution » dans la littérature contemporaine (parce que vous jugez après coup, avec beaucoup de recul).  A l’époque où les a initiées Houellebecq –pas qu’en sociologie, d’ailleurs, mais en technique, en biologie, etc…–, c’était novateur (même si certains l’ont imité depuis – je crois cependant que La télévision est contemporain des Particules). Ce qui me paraît nouveau, c’est d’introduire un certain nombre de données désincarnées du monde qui nous entoure dans la littérature (avec ce que cela peut causer d’artificiel, puisque c’est immatériel), sans leur tourner délibérément le dos, les snober, ou les mépriser comme le fait un peu plus haut d.hasselman. La téléréalité, pour ne citer qu’elle, me paraît justement une matière digne d’inspiration à l’heure actuelle. La regarder de haut, c’est tuer les germes de la créativité qui rodent comme des fantômes autour de nous, et prôner une littérature détachée de toute contemporanéité urbaine comme on en fait depuis un moment du côté de Michon, Bergougnioux (Pierre) (je sais que vous n’aimez pas les catégories, j’en use et j’en abuse…). Une littérature qui n’était pas déconnectée du réel à l’époque où elle était écrite, mais qui l’est (forcément) progressivement devenue (l’excellent Vies minuscules date de 1986). Donc dire aujourd’hui des digressions des Particules élémentaires (1998) qu’elles pourraient être une « caution » parce qu’elles vous apparaissent comme une manifestation "symptomatique" des défauts de notre époque actuelle, ce n’est pas rendre justice à Houellebecq, en ne le remettant pas dans le contexte de la sienne (déjà treize ans…)
(Croyez-moi, cher phA, je ne cherche pas détruire l’individu en énonçant ces quelques catégorisations, mais au contraire à lui redonner les clefs du pouvoir en défendant, non la création singulière qui va de toute façon son amble et risque de plus en plus la dispersion (surtout sur internet), mais la réappropriation par l'homme de ces fameuses catégories qui le réduisent à peau de chagrin (alors qu’elles ne sont après tout que sa création))
(après les méthodes pour cela peuvent diverger, et forcément la "digression sociologique" ne vous apparaître aujourd'hui que comme un copier-coller ou une caution un peu artificielle : là je suis bien d'accord)
 
Commentaire n°18 posté par alain le 08/04/2011 à 14h36
Je n'ai pas lu les Particules élémentaires, j'aurais dû peut-être, la physique m'intéresse davantage que les pages de socio de Plateforme qui m'ont barbé.
Les sujets que vous évoquez, la télé-réalité par exemple, me paraissent tout à fait bons, je n'ai rien à y redire. D'ailleurs tout sujet me paraît bon tant que je sens qu'il s'est imposé de façon essentielle à son auteur, qu'il ne l'a pas choisi en préjugeant de son public.
Réponse de PhA le 08/04/2011 à 19h50